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ALYPIUS.

donnât l’entreprise ; les feux qui sortaient de dessous la terre rendirent le lieu impraticable. Huit ans après il se trouva enveloppé dans l’horrible persécution qui fit périr une infinité de personnes, et qui fut excitée au commencement contre ceux qui avaient cherché par la magie quel serait le successeur de Valens. Quand ceux qui reçurent la commission d’informer contre les coupables eurent mis les choses en train, on ne vit que personnes accusées et tout aussitôt condamnées et punies. Alypius, qui s’était réduit à une vie privée pour y jouir des agrémens du repos, y fut attaqué par des délateurs. On l’accusa d’empoisonnement[a]. Il fut banni : tous ses biens furent confisqués. Son fils Hiéroclès, condamné à mort pour la même accusation, fut sauvé heureusement lorsqu’on le menait au supplice [b]. La nouvelle de cette heureuse rencontre adoucit l’affliction d’Alypius dans son exil. Il y a beaucoup d’apparence que l’auteur d’un ouvrage de géographie qui plut beaucoup à Julien l’Apostat, ne diffère point de notre Alypius (A) ; mais je ne crois point que cet ouvrage soit la Description du vieux monde que Jacques Godefroi a traduite de grec en latin (B). Je ne connais pas bien cet Alypius qui fit un Traité de Musique intitulé Εἰσαγωγὴ μουσικὴ, Introductio musica, dont Cassiodore parle. Meursius est le premier qui l’a publié en grec[c]. M. Hofman eût mieux fait d’oublier entièrement cet article (C). Voyez ses fautes dans la première édition de mon dictionnaire[d].

  1. Voyez la remarque (A).
  2. Voyez comment, dans l’article d’Hiéroclès.
  3. Vossius, de Scient. Mathem., pag. 94.
  4. On a cru qu’on ferait mieux de les remettre ci-dessous dans la remarque (C).

(A) L’auteur d’une Géographie, qui plut à Julien l’Apostat, ne diffère point de notre Alypius. ] Cet auteur vivait sous Julien l’Apostat. On a deux lettres que ce prince lui écrivit, qui témoignent qu’Alypius était frère de Césarius, et qu’il exerçait une charge considérable[1]. Ce dernier caractère convient admirablement à Alypius d’Antioche qui, après avoir été lieutenant de gouverneur en Angleterre, fut envoyé dans la Judée, pour y avoir l’intendance de la construction du temple. Ammien Marcellin nous apprend toutes ces choses : Ambitiosum quondàm apud Hierosolymam templum.... instaurare sumptibus cogitabat immodicis : negotiumque maturandum Alypio dederat Antiochensi, qui olìm Britannias curaverat pro præfectis. Cùm itaque rei idem fortiter instaret Alypius, juvaretque provinciæ rector, metuendi globi flammarum prope fundamenta crebris assultibus erumpentes fecêre locum exustis aliquoties operantibus inaccessum[2]. Voici comme il parle dans le XXIXe. livre : Ecce autem Alypius quoque ex vicario Britanniarum, placiditatis homo jocundæ, post otiosam et repositam vitam (quoniam huc usque injustitia tetenderat manus) in squalore maximo volutatus ut veneficii reus citatus est cum Hierocle filio [3].

(B) Je ne crois pas que cette Géographie soit la Description du vieux monde, que Jacques Godefroi a traduite de grec en latin. ] Cette Description est un ouvrage anonyme, composé sous les empereurs Constantius et Constans. On en avait une ancienne traduction latine fort barbare, que Saumaise communiqua au docte Jacques Godefroi. Celui-ci la fit sor-

  1. Voyez la remarque (B).
  2. Amm. Marcellin., lib. XXIII, cap. I, pag. 350, ad ann. 363.
  3. Idem, lib. XXIX, cap. I, pag. 556, ad ann. 371.