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ALES.

la confession d’Augsbourg, et auteur de plusieurs livres[a], était né à Édimbourg, en Écosse, le 23 d’avril 1500. Il fit des progrès admirables dans la théologie scolastique, et il se mit de bonne heure sur les rangs, afin de rompre une lance avec Luther. C’était alors la controverse à la mode, et le grand champ de bataille où les auteurs jeunes et vieux cherchaient à donner des preuves de leur mérite. Il eut sa part peu après à la dispute verbale que Patricius Hamilton eut à soutenir contre les ecclésiastiques (A), pour la nouvelle créance qu’on lui avait fait goûter à Marpourg. Il tâcha de le ramener au catholicisme ; mais il ne put rien gagner sur lui, et il ne fit qu’entrer en doute lui-même sur sa propre religion, par les discours de ce gentilhomme, et plus encore par la constance qu’il le vit faire paraître sur le bûcher, où David Beton, archevêque de Saint-André, le fit mourir. Les doutes de notre Ales n’auraient eu peut-être aucune suite, si on l’eût laissé jouir en repos du canonicat qu’il possédait dans l’église métropolitaine de Saint-André ; mais on le persécuta avec tant de violence, qu’il fut contraint de se retirer en Allemagne (B), où il acquit enfin une plénitude de lumière. Il flotta d’abord un peu entre les deux religions, comme on le peut voir par ses réponses à Cochleus : mais, au bout du compte, il embrassa le luthéranisme, et il y persévéra jusqu’à sa mort. Il est vrai que dans les divers partis qui s’y formèrent, il se rangea quelquefois du côté de ceux qui paraissaient les moins orthodoxes. C’est ainsi qu’en 1560 il soutint le dogme de George Major touchant la nécessité des bonnes œuvres (C). J’oubliais de dire que le changement qui se fit en Angleterre par rapport à la religion en suite du mariage de Henri VIII avec Anne de Boulen, fut cause qu’Ales alla à Londres en 1535. Il y fut fort considéré par Crammer, archevêque de Cantorbéri ; par Latimer et par Thomas Cromwel, qui étaient alors en grand crédit auprès du roi, et il enseigna même publiquement. La chute de ces favoris l’obligea de retourner en Allemagne, où l’électeur de Brandebourg le fit professeur en théologie à Francfort sur l’Oder, l’an 1540. Ales y eut une querelle deux ans après, sur la question, si le magistrat peut et doit punir la paillardise (D) ? Il était pour l’affirmative avec Mélanchthon. Je ne sais s’il trouva mauvais qu’on différât à prononcer sur cette dispute, et si ce mécontentement fut cause qu’il sortit de Francfort d’une manière précipitée ; mais il est certain que la cour de Brandebourg se plaignit de lui, et qu’elle écrivit à l’université de Wittemberg, pour le faire châtier. L’attachement qu’il avait pour Mélanchthon avait fait croire qu’il s’était retiré à Wittemberg (E) ; cependant il avait mieux aimé se rendre à Leipsick, d’où il refusa, en 1543, une chaire de professeur dans l’académie qu’Albert, duc de Prusse, voulait ériger à Konisberg, et qui fut érigée l’année suivante. On ne sait pas bien si dès lors il avait une profession dans l’université

  1. Voyez la remarque (C).