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VIE DE M. BAYLE.

dernier embarras, à cause de l’arrêt contre les relaps. Cependant, comme je le crus sur ses protestations, revenu de bonne foi, nous prîmes le parti de garder le silence et de passer outre. Il fut plusieurs années dans l’académie, vivant honnêtement, ne faisant et ne disant rien qui scandalisât. La beauté de son génie et ses maximes honnêtes m’attachèrent tellement à lui que je l’aimai plus fortement que je n’ai jamais aimé personne, je l’avoue. »

La composition de son cours de philosophie l’occupa pendant deux ans : c’était un surcroît de travail qui remplissait les intervalles de ses fonctions académiques, et ne lui laissait pas le temps d’écrire à ses amis. « Je n’ai, dit-il à M. Minutoli [1], pu faire réponse autrement que par un billet à votre belle lettre du premier d’avril, à cause des fatigantes occupations où m’ont engagé, pendant ces deux années, la multitude d’exercices qu’il m’a fallu faire à mes écoliers, et la composition d’un cours. Me voici, par la grâce de Dieu, délivré de cette fâcheuse corvée. J’ai achevé mon cours ; mes thèses pour les maîtres-ès-arts sont soutenues. Enfin je suis dans les vacances. »

1678.

Mais encore long-temps après, les vacances étaient le seul temps où il pût prendre quelque relâche. La révision de son cours, les additions qu’il y faisait, et ses leçons publiques et particulières, ne lui laissaient aucun loisir. C’est ainsi qu’il en parle à M. Minutoli dans une autre lettre [2].

1679.

M. Ancillon, ministre de Metz, lui avait fait présent d’un livre de M. Poiret, imprimé à Amsterdam en 1677, sous le titre de Cogitationes rationales de Deo, animâ et malo, et l’avait prié de faire des remarques sur cet ouvrage. M. Bayle lui envoya en 1679 un écrit latin contenant les difficultés qui l’avaient arrêté en le lisant d’un bout à l’autre. Il l’accompagna d’une lettre de remercîment, où il s’excusait de ce que ses occupations ne lui avaient pas permis de satisfaire plus tôt à sa demande, ni de donner à ses objections toute la force et la régularité qu’il aurait souhaité. M. Ancillon communiqua cet écrit à M. Poiret, et celui-ci y fit une réponse qu’il envoya à M. Ancillon, avec une lettre où il le remerciait de lui avoir suscité un adversaire qui faisait paraître tant de pénétration et de politesse. M. Poiret inséra les objections de M. Bayle avec sa réponse dans la nouvelle édition de son livre, imprimé à Amsterdam en 1685, et y joignit les deux lettres dont je viens de parler [3]. Ce petit ouvrage fait voir que M. Bayle avait approfondi les matières les plus su-

  1. Lettre du 29 d’août 1677, p. 130.
  2. Lettre du 15 de décemb. 1678, p. 140.
  3. La lettre de M. Bayle est datée du 13 d’avril, et celle de M. Poiret du 14 d’août 1679.