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VIE DE M. BAYLE.

sentir qu’il vient de main de maître. On y trouve partout des réflexions fines et judicieuses, et des traits vifs et hardis, tant sur les choses que sur les personnes. Il peut servir de modèle aux historiens [1].

Les nouveaux articles que M. Bayle avait dressés pour le Supplément de son Dictionnaire, et qu’il légua au sieur Leers, ne sont pas en fort grand nombre. Il disait lui-même que ce supplément n’était point avancé, et qu’il se sentait du dégoût pour cette espèce de travail, depuis qu’il s’était occupé pendant quelques années à des matières de raisonnement [2]. Il avait promis que ces nouveaux articles ne seraient point incorporés dans la nouvelle édition de son Dictionnaire, et qu’ils seraient imprimés et vendus à part, pour ne pas obliger le public à acheter deux fois la même chose [3] : mais le sieur Leers, ayant quitté la librairie, son fonds tomba entre les mains de deux libraires, qui, sans égard aux intentions de M. Bayle, les firent insérer dans leur édition du Dictionnaire, imprimée en 1720. Et ce qui est encore plus essentiel, on défigura cette édition par des innovations qu’on y fit : la témérité fut même poussée si loin, qu’on changea quelquefois le style de M. Bayle, et qu’on lui supposa des périodes entières. On avait tronqué et mutilé de même la nouvelle édition du Commentaire philosophique, imprimée à Rotterdam, par les mêmes libraires, en 1713 ; mais on s’est conformé à l’édition originale de M. Bayle dans le recueil de ses Œuvres diverses. Ce recueil, publié à la Haye, porte les dates de 1727-1731 ; il contient, en 4 volumes in-folio, tous les ouvrages qu’il a publiés (excepté son Dictionnaire), et quelques écrits posthumes [4].

On n’avait pas mieux traité les Lettres de M. Bayle, que j’avais envoyées à ces libraires, et qu’ils imprimèrent en 1714. On s’ingéra d’y faire plusieurs changemens, et d’y retrancher plusieurs choses. On y joignit des notes, pleine de bévues grossières en fait de littérature, d’insinuations basses et malignes, et de traits calomnieux contre des personnes distinguées, sans épargner M. Bayle. J’ai rétabli ces lettres sur les originaux, dans l’édition qui en a été faite à Amsterdam, en 1729, et je les ai accompagnées de tous les éclaircissemens qui m’ont paru nécessaires [5]. Les Œuvres diverses [* 1] ont été réimprimées en France [6], et on a joint à cette

  1. * Les notes (5 et 6), ainsi que toute la fin de cet alinéa, depuis la phrase qui commence par, Les Œuvres diverses, etc., sont ajoutées sur la recommandation des éditeurs de 1740, qui ont mis tous ces morceaux dans les Additions et corrections qu’ils donnent à la pag. cxx de leur tom. I.
  1. J’ait fait insérer ce discours dans les Œuvres diverses de M. Bayle. Ou le trouvera dans le IVe. tome, p. 885 et suiv.
  2. Lettre à M. Des Maizeaux, du 21 de septembre 1706, p. 1114.
  3. Voyez la lettre à M. Minutol, du 2 de janvier 1702, p. 843 ; et la lettre à M. Marais, du 6 de mars de la même année, pag. 955.
  4. Ces écrits posthumes sont le Cours de philosophie en latin, avec une traduction française, et les deux premiers chapitres de la Vie de Gustave-Adolphe.
  5. On a inséré ces lettres avec des remarques, dans le IVe. tome des Œuvres diverses, et on les a augmentées de quelques lettres qui n’étaient point dans l’édition de 1729.
  6. À Trévoux, sous le nom de la Haye.