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VIE DE M. BAYLE.

mal physique et sur le mal moral. Comme il suppose que ses adversaires n’admettent point la révélation, il n’emploie que des principes tirés de la lumière naturelle. M, Bayle ne convint pas que son système levât les difficultés, et il le réfuta par plusieurs raisons qu’il développa avec beaucoup de précision et de force.

M. Bernard fournit à M. Bayle le sujet d’un autre article fort important. Il donna un extrait critique de la Continuation des Pensées sur les comètes [1], et attaqua M. Bayle sur la question : Si le consentement général des peuples est une preuve de l’existence de Dieu ; sur le parallèle de l’athéisme et du paganisme ; et sur la question : Si une société toute composée de vrais chrétiens, et entourée d’autres peuples ou infidèles, ou chrétiens à la mondaine, serait propre à se maintenir. On fut surpris que M. Bernard, qui avait toujours vécu avec M. Bayle sur le pied d’ami, eût affecté de le combattre ; et on crut qu’étant soupçonné d’être dans les sentimens des arminiens, il avait voulu se réhabiliter dans l’esprit des orthodoxes. Cependant il garda de grands ménagemens pour M. Bayle. « Comme je suis persuadé, dit-il [2], que M. Bayle cherche la vérité de bonne foi, je suis convaincu, sans avoir eu besoin de le consulter, qu’il ne trouvera pas mauvais que je lui propose quelques difficultés dans cet extrait, à mesure qu’elles me viendront dans l’esprit, en observant d’ailleurs toutes les règles de l’honnêteté, de l’estime et du respect que j’ai pour sa personne et pour son mérite. » M. Bayle réfuta fort au long les observations de M. Bernard sur le consentement général des peuples, dans le second tome de sa Réponse aux Questions d’un provincial.

Dans le troisième tome il examina ce qui le concernait dans un livre de M. Jacquelot intitulé : Conformité de la foi avec la raison : ou Défense de la religion, contre les principales difficultés répandues dans le Dictionnaire historique et critique de M. Bayle [3]. M. Jacquelot avait quitté la Haye pour aller à Berlin, où il était chapelain du roi de Prusse. Il se déclara alors ouvertement pour l’arminianisme : ce qu’il n’avait pas osé faire en Hollande sous la domination des synodes wallons. Il avait mis au jour en 1697 un gros volume intitulé : Dissertation sur l’existence de Dieu, où l’on démontre cette vérité par l’histoire universelle de la première antiquité du monde ; par la réfutation du système d’Épicure et de Spinosa ; par les caractères de divinité qui se remarquent dans la religion des juifs, et dans l’établissement du christianisme. On y trouvera aussi des preuves convaincantes de la révélation des livres sacrés [4]. M. Bayle citant

  1. Nouvelles de la république des lettres, février et mars 1705.
  2. Nouvelles, etc., février 1705, p. 125.
  3. À Amsterdam, MDCCV.
  4. C’est un in-4o. de 705 pages. Voyez le jugement que M. Bayle fait de cet ouvrage dans sa lettre à M. l’abbé du Bos, du 13 de décembre 1696, p. 607 et suiv.