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VIE DE M. BAYLE.

n’étaient fondés que sur des ouï-dire. »

C’est là la seule chose que le père Souri aurait désirée dans M. Bayle : il est d’ailleurs très-content de lui. « Encore une fois, dit-il [1], nous n’avons qu’à nous louer, à cet égard, de votre bon goût et de votre équité. Oserais-je cependant, ajoute-t-il, vous dire que le plaisant en cet article vous a fait un peu oublier vos propres maximes, et vous a empêché d’en dire davantage que les deux lignes favorables que je viens de citer ? Jamais conte n’a été plus digne de votre censure que celui-là. Vous songez bien à divertir vos lecteurs, et vous avez vos raisons ; votre intention pourtant n’est pas de les divertir aux dépens de la vérité, et vous ne l’avez jamais perdue de vue à notre égard. »

M. Bayle rendit compte de cet ouvrage dans une addition à l’article Fontevrault. « Cette apologie, dit-il, est si bien tournée et si solide, que tout homme raisonnable y devra acquiescer ; et, quoique j’aie suffisamment fait connaître que je n’ajoutais aucune foi aux bruits qui coururent touchant ce partage de lit, etc., je déclare ici qu’en tous les endroits où j’ai parlé de cela sans y apposer la répétition de mon sentiment, je souhaite qu’elle y soit sous-entendue. » M. Bayle rend au père Souri toute la justice qui lui était due. « L’honnêteté, dit-il, la politesse, l’esprit et l’érudition de l’auteur, y paraissent avec éclat, et je suis bien fâché de ne me trouver point digne des louanges qu’un si habile homme a bien voulu me donner par compliment. »

1702.

La seconde édition du Dictionnaire critique fut achevée le 27 de décembre 1701, et parut au commencement de l’année 1702. Elle était augmentée de près de la moitié. Cette augmentation était contraire à l’intention de M. Bayle. Il n’avait dessein que de faire quelques additions aux articles déjà publiés : il ne se proposait pas d’y en mettre de nouveaux ; il les réservait pour un alphabet à part sous le titre de Suite ou de Supplément du Dictionnaire critique [2] ; mais le libraire souhaita qu’ils parussent dans cette seconde édition, et M. Bayle fut forcé d’y consentir. Ce changement lui fit beaucoup de peine, comme il le témoigne dans l’avertissement. Il distingua les additions de telle manière qu’on pouvait les discerner d’un coup l’œil. Il corrigea avec beaucoup de soin les fautes de la première édition dont il s’était aperçu lui-même, ou que ses amis lui avaient fait remarquer. Il donna des témoignages de sa reconnaissance à ceux qui lui avaient fourni des mémoires, et les nomma lorsqu’il crut pouvoir le faire sans les désobliger. Cependant il avoua que les addi-

  1. Dissertation apologétique, etc., p. 8, 9.
  2. Voyez les lettres à M. de la Monnoie, du 19 d’août 1697, p. 665 ; et à M. Marais, du 2 d’octobre 1698, p. 727.