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VIE DE M. BAYLE.

trouve rien qui lui plaise. Il ne faut donc rien conclure de son mépris : c’est une preuve équivoque. On m’a dit de plus qu’il est fort dévot. Il ne faut donc pas s’étonner qu’il trouve trop libre ce qui dans le fond n’excède point les libertés qu’un honnête homme se peut donner, à l’exemple d’une infinité de grands auteurs. » Il ajoute qu’à l’égard des gaietés un peu trop fortes qu’on trouve dans son Dictionnaire, il ne doutait point qu’on ne fût satisfait quand on aurait vu l’apologie qu’il préparait sur ce point-là ; et il promettait de retoucher l’article de David de telle manière, qu’il ne pourrait plus servir de prétexte aux déclamations de ses censeurs. « J’ai déclaré en toute occasion, dit-il, et je le déclare ici publiquement, que s’il y a des dogmes hétérodoxes dans mon ouvrage, je les déteste tout le premier, et que je les chasserai de la seconde édition. On n’a qu’à me les faire connaître. »

Il marque ensuite plusieurs faussetés que les auteurs des Extraits avaient débitées au sujet de son Dictionnaire : il réfute les calomnies et les insinuations malignes de M. Jurieu, et fait voir qu’il se vantait ridiculement de l’avoir réduit à vivre de la pension d’un libraire : il dit qu’il l’avait critiqué sans affectation et l’avait traité sur le même pied que les autres écrivains dont il avait relevé les fautes ; qu’il lui avait rendu justice lorsqu’on l’avait censuré mal à propos, et que ce n’était pas sa faute s’il n’avait pas eu plus souvent occasion de le justifier ; que ce qu’il avait blâmé dans quelques-uns de ses ouvrages n’était pas la même chose que ce qu’il y louait autrefois ; qu’il le louait alors de bonne foi, et qu’il l’avait ensuite critiqué avec raison, étant mieux instruit.

À l’égard de M. Renaudot, M. Bayle se contenta de marquer deux ou trois faussetés de fait qui étaient dans son Mémoire, se réservant à l’examiner à fond lorsque cet abbé s’en serait déclaré l’auteur. « Si je réfute jamais le Jugement de M. l’abbé Renaudot, dit-il, ce ne sera qu’après avoir su qu’il le reconnaît pour sien, tel qu’on vient de l’imprimer ; car il est si rempli de bévues, de faussetés et d’impertinences, que je m’imagine qu’il n’est point conforme à l’original : on y a cousu, peut-être, de fausses pièces à diverses reprises en le copiant. Il avait prévenu une infinité de personnes ; mais d’habiles gens, ayant lu mon Dictionnaire, firent cesser bientôt cette prévention. M. l’abbé ne l’ignore point, car il a dit dans une lettre, que je dois être content de l’approbation de tant de gens. Aussi le suis-je. On s’étonna qu’il eût mis dans son rapport tant de choses inutiles, Il n’était question que de savoir si mon ouvrage choquait l’Église romaine ou la France. On ne lui avait point demandé si j’ai lu les bons auteurs ou si je mets en balance les anciens avec les modernes. Si plusieurs lecteurs l’ont contredit sur le chapitre de mon ignorance, je les en désavoue :