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VIE DE M. BAYLE.

qu’avait faite le consistoire flamand contre mes Comètes ; et la plupart des opinans demeurèrent d’accord qu’ils n’avaient point lu ce livre, et une partie s’opposa à la révocation de ma pension. C’est donc uniquement pour mon traité des Comètes. Le consistoire flamand, composé presque tout de gens qui n’entendent ni le français, ni autre chose qu’un peu de lieux communs de théologie ; mal intentionné d’ailleurs contre moi depuis mon arrivée en ce pays, parce que le patron que j’y avais, et qui a été le fondateur de l’École illustre (c’était feu M. Paets, grand républicain), leur était fort odieux ; le consistoire, dis-je, n’a fait autre chose que consulter la version qu’on lui avait montrée en flamand des extraits de mon livre, faits par mon accusateur avec la plus grande mauvaise foi du monde. »

M. Bayle écrivit la même chose, mais d’une manière plus circonstanciée, à M. de Naudis son cousin, le 25 décembre. Comme cette lettre n’a point été imprimée, on sera sans doute bien aise de la trouver ici.

« Vous saurez que le 30 d’octobre dernier la pension de cinq cents francs et la permission que j’avais de faire des leçons publiques et particulières me furent ôtées par le Conseil de cette ville, qui est composé de vingt-quatre personnes qu’on nomme en flamand Vroedschap. Les bourgmestres, qui sont quatre en nombre et tirés de ces vingt-quatre, me firent savoir cette résolution, sans me dire pourquoi ils m’ôtaient ce qu’ils m’avaient accordé l’an 1681. J’ai su que plusieurs membres du Conseil s’opposèrent vigoureusement à cette injustice, mais la pluralité de voix l’emporta. Distinguons la cause de ceci d’avec le prétexte,

» Le prétexte dont ils colorent leur conduite quand on leur en parle en particulier, et qui fut même allégué par quelques-uns en opinant le jour qu’on m’ôta ma charge, est que le livre que je publiai ici en 1682, sur les comètes, contient des propositions pernicieuses, et telles qu’il n’est pas d’un magistrat chrétien de souffrir que les jeunes gens en soient imbus. Pour mieux faire valoir ce prétexte, les auteurs de ce complot ont obtenu, par une longue suite d’intrigues, que quelques ministres flamands opiniâtres, grands ennemis des étrangers et de la nouvelle philosophie, et violens et séditieux, examinassent le livre des Comètes, et jugeassent qu’il contenait une mauvaise doctrine. Tout cela s’est fait avec un grand mystère, et sans m’avertir de rien, et sans avoir égard aux déclarations publiques que j’ai faites, et que j’ai cent fois renouvelées aux bourgmestres, aux ministres, etc., en conversation, que j’étais prêt de montrer que mes Comètes ne contiennent rien qui soit contraire, ou à la droite raison, ou à la confession de foi des églises réfor-