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VIE DE M. BAYLE.

à l’occasion des persécutions qui avaient été faites en France aux protestans, il n’avait cité aucun livre anglais, mais s’était borné à ceux qui étaient très-connus aux convertisseurs français. Il y attaque de nouveau l’esprit de persécution, et réfute quelques controversistes catholiques avec beaucoup de force et de véhémence. « L’auteur, dit M. Bayle, parlant de cet ouvrage dans son journal [1], a mis à la tête de son livre un long discours préliminaire, qu’on pourrait justement nommer oraison philippique. La définition qu’il y donne d’un convertisseur est presque aussi cruelle que la chose définie ; tout le reste est à peu près sur le même ton. » Ce discours est précédé d’un avis au lecteur, où le libraire promet de donner incessamment la troisième partie, qui contenait la réfutation des raisons de saint Augustin pour justifier les persécutions.

Les Nouvelles de la République des Lettres acquirent à M. Bayle l’estime non-seulement des particuliers, mais même de plusieurs corps illustres. L’académie française, à qui il avait envoyé son journal, lui en témoigna sa reconnaissance par une lettre où on l’assurait que toutes les voix s’étaient réunies à reconnaître son mérite, et l’utilité de son présent [2]. La société royale d’Angleterre lui écrivit une lettre où elle dit [3] qu’ayant remarqué le soin particulier qu’il avait de ramasser tout ce qui se passait de curieux parmi les gens de lettres, et les beaux talens qu’il faisait éclater dans ces Nouvelles, elle souhaitait d’entretenir avec lui une correspondance fixe et certaine, dont il se pourrait tirer des avantages communs. Il ajoutait que pour première marque de l’estime qu’elle avait pour lui, elle lui envoyait l’Histoire naturelle des poissons par M. Willougby, revue et augmentée par M. Ray. Il reçut aussi des lettres très-obligeantes de la société de Dublin [4]. C’était une compagnie de personnes savantes et curieuses, qui s’était formée pour contribuer au progrès des sciences et des arts ; mais elle ne subsista que quelques années.

D’un autre côté, son journal l’engagea dans quelques disputes, et lui attira quelques plaintes auxquelles il satisfit en s’expliquant, ou en corrigeant de bonne grâce les fautes qu’il avait faites d’après des mémoires peu exacts qu’on lui avait communiqués. Mais on lui fit des reproches auxquels il fut très-sensible, tant par la manière dont ils furent faits, que parce qu’il s’agissait d’une tête couronnée. C’est un des événemens les plus mémorables de la vie de M. Bayle, et qui mérite bien que je rapporte ici toutes les pièces qui le regardent.

Dans les Nouvelles du mois d’avril 1686 [5], il parla d’un

  1. Novembre, ubi supr., p. 1348, 1349.
  2. Lettre de M. de Benserade, du 18 de mai 1685, p. 242.
  3. Lettre de M. Hoskyns, secrétaire de la société royale, du 13 mai 1686, p. 256.
  4. Lettre de M. Smith, secrétaire de la société de Dublin, du 1er. de décemb. 1686, p. 272.
  5. Art. VI des livres nouveaux, p. m. 472.