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SIMONIS.

porta de terribles coups [a]. Heureux s’il avait pu réussir à détromper entièrement les hommes d’un art qui en a déjà tant séduit. Le Sextus, dont je parle, fut un grand géomètre, et c’est par les progrès qu’il avait faits dans cette mère des sciences [b], qu’il découvrit la vanité de l’astrologie, et qu’il résolut d’écrire contre ses principes. L’astrologie a eu d’illustres sectaires ; M. Faydit dans ses remarques sur Virgile et sur Homère, dit que le pape Paul III y était fort attaché, et qu’il donna l’évêché de Civita-Vecchia à Luc Gauric de Fano, parce qu’il y était très-habile : ce fait aurait besoin de quelques preuves [c].

  1. Il aurait été nécessaire de marquer le tour qu’il prit pour combattre l’astrologie. Ce fut de tirer l’horoscope de trente personnes, la plupart princes, rois, papes, etc. ; d’observer dans ces horoscopes les règles de l’art avec beaucoup de précision, et de montrer qu’il n’était rien arrivé à ces trente personnes de ce qui aurait dû leur arriver selon les règles de l’astrologie judiciaire. Ceux qui voudront donner l’article de cet auteur pourront consulter Suffridus Petri au chapitre 9 de la 13e. décade des écrivains natifs de Frise. Rem. de M. Bayle.
  2. Je voudrais que l’auteur eût cité quelque témoignage là-dessus : il ne paraît point que pour connaître la vanité de l’astrologie il faille faire des progrès dans la géométrie. Rem. de M. Bayle.
  3. Il est certain que M. de Thou raconte, au livre 4 de son histoire, pag. m. 87, que Paul III, fort attaché à l’astrologie judiciaire, eut à cause de cela beaucoup d’amitié pour Luc Gauric, et l’admit à sa conversation et à sa table, et enfin lui donna l’évêché de Civitate. Ac tandem Civitatensi Episcopatu donavit. Il y a des livres de Luc Gauric au titre desquels il se qualifie Episcopus Civitatensis. M. l’abbé Faydit ne s’est trompé qu’en ce qu’il a cru que l’évêché que Paul III donna à Gauric était celui de Civita-Vecchia, et que Gauric était natif de Fano. Civita-Vecchia n’est point une ville épiscopale, et appartient au pape : mais l’évêché donné à Gauric est dans la Pouille au royaume de Naples sous l’archevêque de Bénévent, et n’est point le même que celui de Civita-Ducale, comme on l’assure dans le Moréri au mot Gauric (Luc). Gauric n’était point de Fano, mais d’un lieu qu’on nomme en latin Geophanum, et en italien Gifoni, et qui est au royaume de Naples dans la Principauté Citérieure à 5 milles de Salerne. Consultez M. Baudrand sous le mot Geophanum.

    Il ne sera pas hors de propos de réfuter ici une chose que M. Teissier, dans ses additions à M. de Thou, a rapportée sur le témoignage de Tollius, in Appendice de infelicitate Litteratorum. Il raconte que Luc Gauric ayant prédit que Jean Bentivoglio serait banni son pays, et privé de sa souveraineté, encourut l’indignation de ce prince qui le fit mourir dans les tourmens. Cela ne peut être vrai, car Jean Bentivoglio fut chassé de Bologne par le pape Jules II l’an 1506, et mourut à Milan en 1508 ; et il est certain que Luc Gauric fut fait évêque par Paul III, qui ne commença d’être pape que l’an 1534. Il fallait se contenter de dire que Jean Bentivoglio, indigné des prédictions menaçantes de Gauric, lui fit donner la question ; et il fallait ajouter qu’il n’en mourut pas. Cardan le traite de charlatan, et l’accuse d’avoir plutôt conjecturé sur l’état des choses la ruine des Bentivoglio que de l’avoir préconnue par les astres. Gauricus, dit-il, in libro Geniturarum, pag. m. 206, à Bentivolis tortus in equuleo. Id certè ex astris non viderat, quamvis excidium familiæ ominaretur plus ex conjecturâ rerum quàm astrorum, fuit enim sycophanta egregius. M. de Thou ayant dit en un endroit que Gauric était évêque, et en un autre qu’il mourut l’an 1559, il était facile de connaître qu’il n’était point mort dans les tourmens de la question. Un évêque d’Italie est-il exposé à cela de la part surtout d’une famille qui, comme les Bentivoglio, ne dominait alors en nul lieu ? Rem. de M. Bayle.

SIMONIS. Théodore Simonis, ou Simon, est un auteur qui a fait assez de bruit, pour ne devoir pas être oublié dans le grand nombre d’articles des Simons et des Théodores qu’on trouve dans la nouvelle édition. J’avoue que j’attendais avec impatience de voir comment l’éditeur traiterait cet article : je ne sais s’il a eu des raisons pour l’omettre, ou si c’est un pur oubli [1]. Simonis fut un des plus

  1. L’article de Simon ou Simonis n’était pas encore dans l’édition de 1712 : il est dans celle de 1725, tiré du Dictionnaire de M. Bayle. Nouv. Observ.