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DIEPPE. DIEU-DONNÉ.

tur Mater Ecclesia quæ talem habet filium. Le livre qui a donc plus fait d’honneur au chartreux Denis, c’est son Traité de l’autorité du pape et du concile ; et je ne doute pas que ce ne soit la lecture de cet ouvrage qui attira l’exclamation du souverain pontife. Denis Rikel a été constamment une des plus grandes lumières de son ordre, et même de l’église [a].

  1. On pouvait donner plusieurs autres avis touchant cet article ; Moréri a oublié de marquer le lieu de la mort de ce chartreux ; ce fut la chartreuse de Ruremonde dans la Gueldre. (Dans l’édition de 1725, on marque qu’il entra chez les chartreux de Ruremonde, l’an 1433, et y vécut quarante-huit ans. Nouv. Observ.) Il a eu tort de dire qu’on le surnomme Extatique à cause de son attachement à la contemplation ; il fallait ajouter que ce fut principalement à cause qu’on crut qu’il eut des inspirations divines pendant des extases. (On trouve encore dans la dernière édition, que son attachement continuel à la contemplation lui a fait donner le nom de docteur extatique. Nouv. Observ.) Il y a dans sa vie plusieurs singularités qui orneraient bien son article aux nouvelles éditions de Moréri. L’opinion la plus constante est qu’il mourut à l’âge de soixante-neuf ans : néanmoins, Valère André, à la page 190 de sa Bibliothéque belgique, dit que Denis le Chartreux assure qu’il fit le livre de ses Méditations (ce fut son dernier ouvrage) à l’âge de soixante-dix-neuf ans. (Dans la dernière édition, on dit qu’il mourut le 12 mars de l’an 1471, âgé de soixante-neuf ans. On ne cite point Valère André à la fin de cet article. Nouv. Observ.) Rem. de M. Bayle.

DIEPPE. Dieppe est à douze lieues de Rouen, dans la supputation même la plus exacte ; ainsi c’est pour le moins une faute d’exactitude, de dire qu’il n’y a que dix lieues de l’une de ces villes à l’autre. J’avouerai, si l’on veut, que la faute n’est pas d’une grande conséquence ; mais elle pourra paraître digne de l’attention d’un géographe ; et dans un dictionnaire universel il faut satisfaire tout le monde [1].

  1. Dans la dernière édition on a mis que Dieppe est à douze lieues de Rouen. Nouv. Observ.

DIEU-DONNÉ. Il est étonnant qu’on n’ait encore corrigé, dans aucune édition de ce Dictionnaire, cet article : l’erreur qu’on y fait est capitale, puisqu’elle confond deux papes en un seul. Il est certain qu’il y a eu deux papes du nom de Dieu-Donné, ou Deus-Dedit ; le premier succéda à Boniface IV au commencement du septième siècle, c’est-à-dire, l’an 614 : mais, outre celui-là dont parle Moréri, il y en a eu un second qui succéda à Vitalien environ l’an 669, année de la mort de ce dernier. Moréri a pris cette erreur de Platine et d’Onufre, qui confondent ces deux papes. Mais ce qui m’a surpris, c’est qu’on trouve les deux Dieu-Donné dans la table chronologique des papes à l’article de Rome. C’est ce qui fait voir le peu d’exactitude et d’attention des éditeurs : d’ailleurs le second A-Deo-Datus, ou Dieu-Donné régna sept ans, deux mois, et dix-sept jours ; ainsi le temps de son administration est assez long pour devoir être cité [1]. Il s’est même passé des choses considérables sous son pontificat, qui auraient pu servir d’époque aux historiens. C’est ce pape qui permit aux Vénitiens de se choisir un chef, et de créer un duc.

  1. Dans l’édition de 1725, on distingue fort bien ces deux papes : mais on donne l’article du second au mot Adéodat. On n’y suit pas la chronologie de notre auteur : on dit qu’Adéodat succéda à Vitalien l’an 671, et qu’il mourut le 18 mai de l’an 676, après avoir tenu le siége cinq ans, deux mois, et dix-sept jours. Nouv. Observ.