Page:Bayle - Dictionnaire historique et critique, 1820, T15.djvu/330

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
322
ÉCLAIRCISSEMENT

présente dans son épître dédicatoire que ceux qui le blâmeront de n’appeler que probables les principes du christianisme, seront des gens qui n’auront ni bien examiné les fondemens de leur religion, ni bien entendu la nature de la foi. D’où viennent, dit-il, tant d’éloges qui sont donnés à cette vertu dans l’Écriture, et tant de récompenses qui lui sont promises ? N’est-ce point à cause qu’elle fait marcher les hommes dans le bon chemin, malgré les pierres d’achoppement et les entraves qu’ils y rencontrent ? Rapportons ses paroles : Quosdam fore non dubito, majori ductos zelo quàm judicio, qui meos prorsùs condemnabunt labores, meque religionem potiùs evertere quàm astruere temerè nimis concludent. Illi utique omnia religionis dogmata tanquam certissima amplectentes rem christianismo indignam me præstitisse putabunt, qui ejus probabilitatem tantùm evincere conatus fuerim. Illis verò ego nihil jam habeo quod dicam, nisi quòd præjudiciis suis præoccupati, religionis quam profitentur fundamenta non accuratè satis hactenùs examinaverint, nec fidei : quæ tantoperè in sacris litteris laudatur, naturam ritè intellexerint. Quid enim est fides ? nisi illa mentis persuasio quâ propter media ex probabilitate deducta, quasdam propositiones veras esse credimus. Si persuasio ex certitudine oriatur, tum non fides sed scientia in mente producitur. Sicut enim probabilitas fidem generat, ita etiam scientiam evertit, et è contra : Certitudo scientiam simul generat et fidem destruit. Unde scientia omnem dubitandi ansam aufert, dum fides aliquam semper hæsitationem in mente relinquit : et proptereà fides tantis insignitur laudibus, tantaque sibi annexa præmia habet, quòd homines, non obstantibus omnibus illis quibus premuntur scrupulis, in recto virtutis et pictatis tramite progrediantur, quæque Creatori suo omnipotenti grata futura credunt, summâ ope præstare conentur : se tam paratos esse jussis quibuscunque divinis obsequi ostendunt, ut ne ea quidem quæ probabiliter tantùm ab ipso proveniant, rejicere velint [1].

VIII. Il y a tant de gens qui examinent si peu la nature de la foi divine, et qui réfléchissent si rarement sur cet acte de leur esprit, qu’ils ont besoin d’être retirés de leur indolence par de longues listes des difficultés qui environnent les dogmes de la religion chrétienne. C’est par une vive connaissance de ces difficultés que l’on apprend l’excellence de la foi et de ce bienfait de Dieu. On apprend aussi par la même voie la nécessité de se défier de la raison ; et de recourir à la grâce. Ceux qi n’ont jamais assisté aux grands combats de la raison et de la foi, et qui ignorent la force des objections philosophiques, ignorent une bonne partie de l’obligation qu’ils ont à Dieu, et de la méthode de triompher de toutes les tentations de la raison incrédule et orgueilleuse.

Le vrai moyen de la dompter

  1. Johannes Craig., Epist. dedic.