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SUR LES PYRRHONIENS.

enim mihi nolenti volenti credendum fuisset, nec ad me pertinuisset benedictio de omnibus illis pronunciata, qui non videntes crediderint. Facilis est eorum et necessaria credulitas, qui ea credunt, quæ oculi et sensus exploraverint. Eum mortuum et sepultum resurrexisse credo, inque gloriâ ejus potiùs quàm in cenotaphio et sepulcro contemplari cupio. Hæc autem credere minimum est ; hanc fidem, ut æquum est, historiæ debemus. Illis erat præ cæteris nobilis et animosa fides, qui ante adventum ejus vixerant : ex obscuris enim vaticiniis, mysticisque typis credenda expiscati, expectârunt ea, quæ impossibilitatem quandam præ se ferebant [1]. Il dit que la foi sert d’épée contre tous les nœuds qui se rencontrent dans les mystères de la religion, mais que pourtant il s’en sert plutôt comme d’un bouclier, et qu’il a trouvé qu’on sera invulnérable dans ces sortes de combats, si l’on se munit de ce bouclier [2]. Il rapporte sur quelques articles les objections que la raison et l’expérience lui suggéraient, et il ajoute que nonobstant cela sa foi est très-ferme, et que la foi pour être exquise doit persuader les choses qui sont non-seulement au-dessus de la raison, mais qui semblent aussi répugner à la raison et au témoignage des sens. Verissima tamen esse hæc omnia credo, quæ tamen false esse mihi ratio persuadere parat..... Nec fidei esse vulgaris arbitror res hujus modi credere, quæ non rationem tantùm superare, sed et ipsi, et sensuum testimoniis repugnare videntur [3].

Notez que cet écrivain parle de la sorte dans un livre intitulé Religio Medici, la Religion du Médecin, et qui, à ce que disent certaines gens, pourrait être intitulé, le Médecin de la religion, ouvrage en un mot qui a fait croire à quelques personnes que l’auteur était un peu éloigné du royaume des cieux [4]. On lui pourrait donc appliquer ces paroles de l’Évangile, Non inveni tantam fidem in Israël : Même en Israël je n’ai point trouvé une si grande foi [5].

VII. Le mathématicien que je dois citer publia à Londres en 1699 un écrit de 36 pages in-4°., intitulé Theologiæ Christianæ Principia mathematica. Il prétend que les principes de la religion chrétienne ne sont que probables, et il réduit à des calculs géométriques les degrés de leur probabilité, et ceux du décroissement de cette probabilité. Il trouve qu’elle peut durer encore quatorze cent cinquante-quatre ans, d’où il conclut que Jésus-Christ reviendra avant ce temps-là. Il dédie cet ouvrage à M. l’évêque de Salisbéri, et il re-

  1. Idem, ibid.
  2. Nec durior erit metaphora, si quis dicat : Gladius fidei. Eadem tamen in hujusmodi nodis pro clypeo potiùs utor, quo titulo ab Apostolo insignitur : eumque invulnerabilem fore comperi, qui hoc munitus in certamen descenderit. Idem, ibid., sect. IX, pag. 48.
  3. Thomas Browne, Religio Medici, part. I, sect. IX, pag. m. 49.
  4. Cet auteur.... est un mélancolique agréable en ses pensées ; mais qui, à mon jugement, cherche maître en fait de religion, comme beaucoup d’autres, et peut-être qu’enfin il n’en trouvera aucun. Patin, lettre III, pag. 13 du premier tome.
  5. Évangile selon saint Matthieu, chap. VIII, vers. 10.