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SCULTET.

affaires ecclésiastiques en ces quartiers-là. Il suivit en Angleterre le prince palatin Frideric V, l’an 1612, et fit connaissance avec les plus doctes personnages du pays. Il fit un voyage à la cour de Brandebourg, l’an 1614, l’électeur Jean Sigismond, prêt à renoncer au luthéranisme ayant souhaité de concerter avec lui les mesures de ce changement. Il s’acquitta bien des commissions qu’on lui donna dans une telle conjoncture [a]. Étant retourné à Heidelberg, il accepta par de très-bonnes raisons la charge de prédicateur aulique. Il en obtint la démission lorsqu’en 1618 il fut établi professeur en théologie. On le députa peu après au synode de Dordrecht. Il tâcha d’abord de réunir les esprits ; mais voyant qu’il n’y avait rien à espérer de ce côté-là, il maintint vigoureusement les dogmes des contre-remontrans. Il prêcha à Francfort l’année suivante pendant la tenue de la diète électorale ; car son maître le donna pour prédicateur aux députés qu’il y envoya. Il suivit ce prince au voyage de Bohème, et s’étant retiré dans la Silésie après la malheureuse journée de Prague, il se résolut à s’en retourner à Heidelberg pour y remplir les fonctions de professeur. Il n’y fut pas plus tôt arrivé qu’il fallut cesser tous les exercices académiques ; l’ennemi était aux portes, la plupart des professeurs cherchèrent une retraite. Il se retira à Bretten, et puis à Schorndorf au pays de Wirtemberg, d’où il partit pour se rendre à Embden au mois d’août 1622. Le roi de Bohème, son maître, avait consenti que la ville d’Embden offrît à Scultet une place de ministre. Cette vocation fut acceptée [b] ; mais le professeur d’Heidelberg n’en jouit pas fort longtemps ; car il mourut le 24 d’octobre 1625 [c]. Il fut marié trois fois, et ne laissa qu’une fille (C). Jamais homme n’a été déchiré plus cruellement que lui par les médisances de ses ennemis (D). J’ai dit ailleurs [d] qu’il désapprouvait que les protestans fissent des livres les uns contre les autres. Ce qu’il observe, en répondant à un homme qui l’accusa d’avoir excité une guerre sacramentaire dans le Palatinat (E), est digne de considération. Je ne ferais pas difficulté de croire qu’il se serait mieux justifié de l’accusation d’avoir poussé l’électeur son maître à accepter la couronne de Bohème, si cette entreprise eût été heureuse. Il n’eût point fallu en ce cas-là qu’il niât le fait (F), on l’eût comblé de bénédictions, sa prudence aurait été admirée : on ne juge guère des choses que par l’événement.

  1. Profectus sum Berlinum, ibique rem Christi pro virili ad mensem usque octobrem, egi. Abraham Scultetus, ubi infrà, cit. (H).
  2. Tiré d’un livre d’Abraham Scultet, intitulé : de Curriculo vitæ... Narratio apologetica, imprimé à Embden, 1625, in-4°.
  3. Paul Freher., in Theatro, p. 425 ; mais, selon le Diarium de Witte, ce fut l’an 1624.
  4. Dans l’art. Pitiscus, t. XII, pag. 155, remarque (B).

(A) Il est auteur de plusieurs livres. ] On a vu au texte de cet article qu’il instruisait des écoliers dans sa chambre avant même qu’il eût cessé d’être écolier. Leur ayant fait des leçons sur la morale et sur la sphère dans Heidelberg, cela produisit un livre qui fut bientôt publié, et qu’on expliqua dans quelques écoles illustres.