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MOTHE-LE-VAYER. MOTTE.

illo die, pro illius diei accepit. At Apollonii enarratores contrà intelligunt, eo ipso die quo contrà jus pronunciaverit in carcerem trudi, quoad fame pereat, citantquæ expositionis assertores Ephorum et Nymphodorum. Addo ego astipulari interpretibus Apollonii, Nicolaum de moribus gentium referente Joanne Stobæo [1]. Voici tout le passage du scoliaste : Ἱςρεῖ Έϕορος καὶ Νυμϕόδωρος περὶ τούτων, ὅτι τὸν βασιλέα αυτών ἄδικον τι κρίναντα, ἐγκλείουσι καὶ λιμαγχονοῦσι.
Je l’ai rapporté, afin qu’on vît que le critique étend un peu trop ses droits ; car il est faux que le scoliaste donne aux paroles du texte l’explication de Pintien, et qu’ensuite il la prouve par l’autorité d’Éphore, et de Nymphodore : il cite simplement ce qu’ont dit ces deux auteurs. Je suis pourtant de l’avis de Pintien, et je trouve qu’Isaac Vossius l’a réfuté pitoyablement. Il suppose que pour les fautes les plus légères les Mosynœciens condamnaient leur roi au jeûne d’un jour, et que pour les fautes graves ils le condamnaient à mourir de faim [2]. Il donne cela pour le véritable sens des paroles d’Apollonius, et il soutient qu’elles ont été bien interprétées par Pomponius Méla [3]. Interpretatio Melæ, ajoute-t-il, ut facilior ita quoque melior. Voilà une chose bien étrange : Apollonius aura voulu nons instruire de la distinction que faisait ce peuple entre les petites fautes de son prince, et les grandes fautes : il aura voulu que nous sussions que pour celles-là on faisait jeûner ce prince un jour entier, et pour celles-ci jusqu’à la mort ; et néanmoins il n’aura coulé dans son récit ni phrase, ni mot, qui insinue cette distinction. Pomponius Méla aura très-bien expliqué le sens d’Apollonius, et néanmoins il n’aura rien dit de la punition des grandes fautes ; il se sera arrêté aux idées les moins désavantageuses à une nation qu’Apollonius voulait décrier ; il se sera tu absolument à l’égard du fait qui la pouvait rendre plus odieuse ; enfin il n’aura marqué dans ses expressions aucune trace de la distinction dont il s’agit. Où sont les gens qui digèreront cela ? Pour qui est-ce qu’Isaac Vossius prenait ses lecteurs ? On trouverait mille fautes de cette nature dans les meilleurs écrivains, si l’on se donnait la peine d’éplucher rigoureusement leurs livres.

Notez qu’il faut convenir qu’Apollonius s’est expliqué trop confusément : c’est ce qui a fait errer Pomponius Méla. Je m’étonne que Diodore de Sicile ne dise rien de cette loi ; lui qui observe que ces barbares tenaient enfermé leur prince toute sa vie dans le donjon de leur capitale [4].

  1. Pintianus, Castigat. in Pomponium Melam, pag. m. 37.
  2. Isaacus Vossius, in Melam, pag. m. 104.
  3. Hic quidem videtur sensus esse verborum Apollonii que rectè interpretatus est Mela, licet contrarium, existiment Pintianus aliique viri magni. Idem, ibidem.
  4. Locus iste aliorum castellorum veluti caput et primaria regionis arx, fuit : in cujus parte editissimâ rex aulam habebat. Patrius autem hic mos pro lege erat, ut per totam inibi vitam rex subsistens mandata populis indè distribueret. Diodorus Siculus, lib. XIV, cap. XXXI, pag. m. 592.

MOTHE LE VAYER (François de la). Cherchez Vayer, t. XIV.


MOTTE ou MOTHE (la), ville de Lorraine. Le Moréri marque où elle était située, et qu’elle fut prise par les Français, l’an 1634 (A) et que depuis elle a été ruinée. Cela est trop vague ; on a besoin d’un récit un peu mieux circonstancié. Disons donc que cette place fut rendue au duc de Lorraine, par un traité de paix, l’an 1641 ; mais comme ce prince n’exécuta point ce traité, le cardinal de Richelieu souhaita passionnément de lui enlever la Motte : il n’en vint pas néanmoins à bout ; les troupes de France qui la bloquèrent furent contraintes de se retirer (B). On ne travailla tout de bon à la réduire, qu’en 1645. Le cardinal Mazarin la fit assiéger par Magalotti son neveu, qui poussa les attaques avec beaucoup de vigueur, et qui trouva d’autant