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MAINUS.

une personne catholique qui écrivait contre l’Exposition de M. de Condom. Je me sers des mêmes paroles que M. de Condom cite comme tirées de la page 23 de la préface de M. de la Bastide : mais voici ce que je trouve dans cette préface à la page 30 de la seconde édition. On a su qu’il y a quelque personne de l’église romaine qui écrit contre cette même Exposition de M. de Condom, et ce que ceux de sa communion pourront dire touchant leur propre créance sera encore de plus de poids, et moins suspect dans leur bouche que dans la nôtre. M. de Condom remarque que l’on abusait messieurs de la religion quand on leur disait cela. Ce serait certainement, ajoute-t-il [1], une chose rare, que ce bon catholique, que les catholiques n’ont jamais connu, eût été faire confidence aux ennemis de l’église de l’ouvrage qu’il méditait contre un évêque de sa communion. Mais il y a trop long-temps que cet écrivain imaginaire se faisait attendre ; et les prétendus réformés seront de facile créance, s’ils se laissent dorénavant amuser par de semblables promesses. Cette personne de l’église romaine, dont M. de la Bastide voulait parler, était notre Théodore Maimbourg, qui passa en Angleterre environ l’an 1682, pour rentrer dans l’église protestante. Il prit avec lui divers manuscrits qu’il avait faits, et entre autres une réponse à la Méthode pacifique de son cousin le jésuite, et une réponse à l’ouvrage de l’évêque de Condom. La première de ces deux pièces fut imprimée à Roterdam, l’an 1683. On exhorta le libraire à imprimer incessamment la seconde ; mais le débit de la première ne l’y encouragea point. Ainsi l’ouvrage est demeuré dans les ténèbres du cabinet. L’auteur fut donné pour gouverneur à l’un des fils naturels du roi d’Angleterre Charles II. Il est mort à Londres il y a deux ou trois ans [2] [* 1], et si l’on en veu croire les bruits qui coururent, il déclara aux ministres qui le préparèrent à la mort, qu’il mourait socinien, et l’on ne put jamais l’en faire démordre. J’ai ouï dire que c’était un homme de bonne mine, et qui avait de l’esprit, et assez de science du monde. Ce que l’on a lu dans une lettre de M. Simon [3] est tout-à-fait propre à persuader que cet homme-là mourut ouvertement unitaire, et qu’il l’avait été assez longtemps incognito. C’est une particularité bien curieuse. Je vous conseille de l’aller lire dans original.

Il y a un jésuite lorrain nomme Jean Maimbourg, qui ne cédait ni en savoir, ni en esprit, au fameux Sérarius, autre jésuite lorrain ; mais il ne voulut jamais publier de livres, quoiqu’on l’y exhortât vivement. C’est un jésuite du même pays qui conte ces choses. Magnum uterque Lotharingiæ lumen, magnum eruditionis omnis ornamentum, magnum pietætis, et christinæ modestiæ decus. Ambo florentes ingeniis, eruditi ambo, ambo in omnis generis authorum assiduâ lectione versati, vel potiùs omnibus tùm sacræ tùm profanæ doctrinæ partibus absoluti atque perfecti : ambo sacras litteras, et hanc ipsam, que me suspensum tenebat, transcriptionem,

Explanare pares, et respondere parati.


Alterscriptis in lucem publicam emissis illustrior : alter in genio par, eruditione, virtutibus : hoc uno duntaxat inferior quòd adduci nunquàm potuit, ut ingenii doctrinæque suæ fœtus expromeret, ac prælo mandari pateretur. Alter erat Nicolaus Serarius, alter Joannes Memburgus [4].

  1. * Leclerc dit que c’est en 1693 que mourut Théodore Maimbourg

    de ce prélat sur la seconde édition, pag. 25, édition de Hollande.

  1. Là même.
  2. On écrit ceci au mois de janvier 1696.
  3. La VIe. de ses Lettres choisies, pag. 64, 65 de l’édition de Trévoux, 1700.
  4. Nicol. Abramus, in Pharo Veteris Testamenti, pag. 256, col. 2.

MAINUS (Jason), l’un des plus célèbres jurisconsultes de son siècle, naquit l’an 1435 [* 1]. Andréot Mainus, son père, ayant été banni de Milan, pour un crime qu’il avait commis, se retira à Pésaro, et y engrossa sa servante

  1. * Il y a dans cet article, dit Leclerc, bien des faits uniquement fondés sur des ouï dire. J’en dis autant de l’article Majoragius et de beaucoup d’autres dont le détail serait trop long.