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LISMANIN.

prince. J’ai touché dans un autre endroit [1] la distinction de gouverneur et de précepteur : vous allez voir clairement dans les paroles de Plutarque, qu’il faut que je copie afin que mes lecteurs puissent connaître l’erreur d’Amyot. Λεωνίδας...... μὲν οὖν ϕεύγων τὸ τῆς παιδαγωγίας ὄνομα, καλὸν ἐχούσης καὶ λαμπρὸν, ὑπὸ δὲ τῶν ἄλλων, διὰ τὸ ἀξίωμα και τὴν οἰκείοτητα, τροϕεὺς Ἀλεξάνδρου καὶ καθηγητὴς καλούμενος, ὁ δε τὸ σχῆμα τοῦ παιδαγωγοῦ καὶ τὴν προηγορίαν ὑποποιούμενος ἦν Λυσίμαχος, τῷ γένει Ἀκαρνὰν, ἄλλο μὲν οὐδεν ἔχων ἀςεῖον, ὅτι δ᾽ ἑαυτὸν μὲν ὠνόμαζεν Φοίνικα, τὸν δε Ἀλέξανδρον Ἀχιλλέα, Πηλέα δέ τὸν Φίλιππον, ἠγαπᾶτο, καὶ δευτέραν εἶχε χώραν. Leonidas..…. pædagogi nomen cum honesto et specioso conjunctum officio repudiabat, atque ab aliis dignitatis et necessitudinis causa nutritius Alexandri et rector vocabatur : ille qui speciem pœdagogi et vocabulum sumebat Lysimachus, natione Acarnan, urbanitate nullâ præditus erat aliâ, sed, quòd Phœnicen nominaret se, Alexandrum, Achillem, et Philippum, Pelea, ideò gratus erat, et secundum locum tenebat[2].

  1. Dans l’article Achille, tom. I, pag. 158, remarque (C).
  2. Plutarchus, in Alex., pag. 667, B.

LISMANIN (François), natif de Corfou, docteur en théologie et cordelier célèbre[a], entra dans l’église protestante ; mais il ne s’arrêta pas où il devait, car il poussa jusque dans l’arianisme. Cela se fit par degrés. Il était confesseur de Bonne Sforce, reine de Pologne, et son prédicateur en langue italienne, etc. [b] (A), lorsque Jean Tricessius, homme docte et de qualité, répandait clandestinement à Cracovie les semences de la réformation [c]. Lismanin, fort ébranlé par la lecture d’un livre dont la reine lui avait fait présent[d], se confirma dans ses soupçons contre l’église romaine, en conférant avec Jean Tricessius[e], qui outre cela lui prêtait les livres des réformateurs[f]. Il devint bientôt suspect d’hérésie ; mais il joua de tant d’adresse, que l’évêque de Cracovie ne put jamais le convaincre d’avoir les livres de Luther et de Calvin. Il évita les piéges que ce prélat lui tendit à Rome. Lismanin y était allé l’an 1550, pour féliciter de la part de la reine Bonne, le nouveau pape Jules III[g]. L’évêque écrivit à Rome que c’était un hérétique caché, et qu’il fallait le mettre en prison, et l’empêcher de revoir jamais la Pologne. Cet avis arriva un peu trop tard ; Lismanin s’en retournait déjà auprès de la reine sa maîtresse. Dès qu’il fut arrivé à Varsovie, où elle faisait sa résidence, il reçut des lettres du roi de Pologne, Sigismond Auguste, fils de cette reine, qui le chargeait de travailler à la faire revenir de sa colère, car elle était fort irritée de ce que ce prince s’était marié avec Barbe Radzivil (B). Il fit trois voyages pour mettre la paix entre les deux reines (C) : le roi en fut si content, qu’il lui fit promettre le premier évêché qui vaquerait. Sur ces entrefaites Lélius Socin, qui arriva en Pologne, l’an 1551 [h], conseilla à Lismanin de jeter le froc, et de s’en aller dans

  1. Biblioth. Antitrinitariorum, pag. 34.
  2. Ibidem.
  3. Historia Reformat. Polonicæ, pag. 18.
  4. Ibid., pag. 23.
  5. Ex lectione concionum Bernardini Ochini Itali… à reginâ Bonâ sibi oblatarum, totam religionem romanam in suspicionem traxerat. Histor. Reformat. Polonicæ, pag. 23.
  6. Ibidem, pag. 21.
  7. Ibidem, pag. 24.
  8. Ibidem, pag. 40.