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CAUSSIN.

prendre la place du cardinal. Ce duc, avertissant de ce complot le premier ministre, fut cause de la disgrâce du père Caussin, à ce que dit l’abbé Siri.

(D) Il mourut... le 2 de juillet 1651. ] M. Moréri, qui s’était trompé au temps que Caussin se fit jésuite [1], s’est trompé de plus au temps de sa mort : il l’a mise à l’année mil six cent cinquante-cinq. MM. Bullart et Witte ont marqué comme il fallait le temps de la mort, mais non pas la durée de la vie. L’un veut que Caussin soit mort le 2 de juillet 1651, en la soixante-neuvième de ses années [2] ; l’autre qu’il soit mort le 2 de juillet 1651, à la quatre-vingt-unième année de sa vie, et à la cinquante-septième de sa profession de jésuite [3]. Cela ne s’accorde ni avec le père Alegambe, ni avec le père Sotuel. Selon le père Alegambe, l’entrée de Caussin chez les jésuites est de 1606, et Caussin avait alors vingt-six ans. Il serait donc mort à l’âge de soixante-onze ans, et dans la quarante-cinquième année de sa vie religieuse. Le père Sotuel prétend que Caussin se fit jésuite à l’âge de vingt-six ans, en l’année 1596. Il serait donc mort à l’âge de quatre-vingt-un ans, et n’aurait été jésuite que cinquante-cinq ans. Je crois qu’il s’en faut tenir au père Alegambe [* 1].

(E) De tous ses ouvrages aucun ne lui a fait plus d’honneur que celui qu’il intitula la Cour Sainte. ] Il a été imprimé je ne sais combien de fois [4], et on l’a traduit en latin, en italien, en espagnol, en portugais, en allemand et en anglais [5]. La première édition du Ier. volume est de l’an 1625, in-8o. Les autres tomes suivirent de près celui-là. Je critiquerai ci-dessous [6] M. Bullart, qui a dit que Caussin se retira de la cour pour composer la Cour Sainte ; il fallait dire qu’il la revit et l’augmenta pendant sa disgrâce.

(F) .…. Il en publia plusieurs autres, tant en latin qu’en français. ] Les premiers essais de sa plume furent les Symboles sacrés, quelques pièces de poésie qui se trouvent dans la Pompe royale, et les Parallèles de l’éloquence [7]. Il fit ces trois livres encore assez jeune, à ce que dit son éloge. Cependant on marque dans la Bibliothéque des écrivains jésuites que l’Electorum Symbolorum et Parabolarum Historicarum Syntagma, seu de symbolicâ Ægyptiorum Sapientiâ et Polyhistoris symbolici lib. XII, fut imprimé à Paris, l’an 1618, et que l’Eloquentiæ sacræ et humanæ Parallela fut imprimé à la Flèche, l’an 1619. L’auteur avait donc près de quarante ans, au compte du père Alegambe, et près de cinquante, au compte du père Sotuel, lorsqu’il publia ces deux livres. Est-ce être encore assez jeune ? Entre ces autres ouvrages, je remarque principalement l’Apologie pour la société des jésuites, imprimée l’an 1644, la Réponse aux objections touchant la théologie morale ; le Triomphe de la piété, qu’il publia au sujet de la prise de la Rochelle, l’an 1629 ; la réponse qu’il publia trois ans après au livre de M. Drelincourt [8] contre ce Triomphe de la piété ; l’Angelus Pacis, imprimé l’an 1650 ; le Regnum Dei seu Dissertationes in libros Regum cum aliis Tractatibus, imprimé aussi l’an 1650 [9].

(G) Le sieur Bullart est tombé dans quelques anachronismes. ] J’ai déjà marqué [10] sa méprise touchant l’âge du père Caussin, n’en parlons plus ; voyons le reste. « Il n’y avait pas longtemps qu’il (le père Caussin) s’était voué à Dieu sous l’habit et la

  1. * Bayle à la fin de sa remarque (A) a parlé de la réserve d’Alegambe et de Sotuell.
  1. Il dit que Caussin se fit religieux en 1605. Ce fut en 1606, selon Alegambe ; et en 1596, selon Sotuel.
  2. Bullart, Académie des Sciences, tom. II, pag. 225.
  3. Witte, Diar. Biograph.
  4. L’édition dont je me sers est de Bruxelles, 1664, en deux volumes in-4o. Il y en a une de Paris, 1680, en deux volumes in-folio.
  5. Sotuel, Biblioth, Societ. Jesu, pag. 627.
  6. Remarque (G), citation (30).
  7. Éloge du père Caussin. Voyez la dernière remarque.
  8. Ce livre de M. Drelincourt est la IIe. partie du Triomphe de l’Eglise sous la Croix. L’auteur nous apprend dans la préface que Caussin, dans la seconde édition de son livre, avait cherché tous les détours imaginables pour soutenir que la prise de la Rochelle était une preuve que cette ville était hérétique. M. Drelincourt le réfute invinciblement là-dessus dans sa préface.
  9. Tiré de Sotuel, Biblioth, Soc. Jes., pag. 627.
  10. Ci-dessus, remarque (D), citat. (15), etc.