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BOSC.

son discours, il eut la liberté de représenter plusieurs choses. Tout cela lui réussit d’une manière qui fit parler de son éloquence et de sa prudence à toute la cour. Après plusieurs conférences avec M. le Tellier, et plusieurs allées et venues, on obtint au mois d’avril 1669 quelque chose contre la déclaration de l’année 1666. Depuis ce temps-là, M. du Bosc a fait une infinité de voyages pour les affaires des églises, et les a soutenues devant les ministres d’état, et devant les intendans, avec toute la force et toute l’habileté imaginable [a], jusqu’à ce qu’il fut réduit lui-même, par un arrêt du parlement de Normandie, le 6 de juin 1685, à ne pouvoir plus exercer son ministère dans le royaume. S’il avait été possible de sauver l’église réformée de France par la voie de la négociation, il était le plus propre à y réussir que l’on eût pu employer [b]. Il est certain qu’il a éloigné le mal par ses soins et par sa prudence [c], et qu’il savait manier ces affaires, avec tant d’adresse et tant d’agrément, qu’elles ne pouvaient tomber en de meilleures mains [d]. Il se retira en Hollande, après son interdiction, et y été ministre de l’église de Rotterdam, jusqu’à sa mort arrivée le 2 de janvier 1692. Il fit une fin fort chrétienne, et digne de cette vie réglée, et tout-à-fait édifiante qu’il mena toujours [e]. Jamais homme ne soutint plus dignement que lui la gravité de son caractère : le corps en cela répondait à l’âme ; car il avait la mine majestueuse, ce qui ne contribua pas peu à la gloire qu’il s’acquit en matière de prédication : cela est facile à comprendre. Il eut aussi de fort grands talens pour présider à un synode (E), et pour se faire estimer dans le grand monde (F). On lui rendit justice en Hollande ; il y fut généralement estimé : les sectaires mêmes ne purent refuser à la sagesse de sa conduite le respect qu’elle mérita ; et ils vénéraient M. du Bosc. autant qu’ils méprisaient ces gens violens, qui, par leur humeur turbulente et misanthrope, se rendaient indignes d’avoir l’approbation de ceux de dehors, que l’Écriture recommande si expressément aux ministres de Jésus-Christ [f]. Il avait été marié deux fois, et n’a laissé que deux filles (G). Nous parlons de ses écrits dans l’une de nos remarques (H). Le Ménagiana fait mention de lui d’une manière qui n’est pas désavantageuse (I).

  1. Le détail de sa conduite dans tout le cours de ces affaires est exactement rapporté par M. le Gendre, dans sa Vie de M. du Bosc.
  2. Si Pergama dextrâ
    Defendi possent, etiam hâc defensa fuissent.
    Virgil., Æn., lib. II, vs. 291.

  3. Vie de M. du Bosc, pag. 2.
  4. Là même, pag. 3.
  5. Tiré de sa Vie composée par M. le Gendre, ci-devant ministre de Rouen, et présentement de Rotterdam.
  6. Ire. Épître à Timothée, chap. III, vs. 7.

(A) On employa,... pour l’attirer à Charenton, les lettres des personnes les plus qualifiées de la religion. ] M. et madame de Turenne, M. et madame de la Force, madame de la Trimouille et madame de Rohan, firent écrire ou écrivirent à M. du Bosc de leur propre main, pour le presser d’accepter la vocation de l’église de Paris. Leurs lettres sont encore dans