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AVENTIN.

qu’il a vécu au XVIIe. siècle [a] ; et je crois que ce neveu est l’auteur que l’on appelait D’Audiguier le jeune, et qui publia, entre autres ouvrages, l’Éromène. Un passage, que je cite ci-dessous, me fait croire que l’on tua notre d’Audiguier l’an 1630 (B).

  1. Marolles, Dénombrement des auteurs, pag. 407.

(A) Il est auteur de plusieurs livres. ] Il publia à Paris, chez Pierre Billaine, en 1617, le Vrai et ancien Usage des Duels. C’est un livre de 532 pages in-8°., qui n’est pas indigne des bibliothéques. Il publia aussi quelques vers français : les Amours de Lysandre et de Calliste, celles d’Aristandre et de Cléonice, la Flavie, la Minerve [* 1], etc. Ce sont des romans, qui eurent beaucoup de cours[1]. Il traduisit en français les Nouvelles de Miguel de Cervantes [* 2]. Voici le jugement que Sorel a fait de cet auteur, dans un ouvrage qui a suivi de bien loin son Berger extravagant. « Je ne pense pas, dit-il[2], qu’on doive mépriser absolument le sieur d’Audiguier, auteur des Aventures de Lysandre et de Calliste. Quoiqu’il n’eût pas beaucoup d’étude, il écrivait en ce temps-là d’un style assez vigoureux et assez net, comme on voit dans plusieurs romans qu’il a composés, dans ses lettres, et dans quelques traductions. Au commencement, ayant fait un livre appelé la Philosophie soldade, il avait encore un peu de gasconisme ; mais il s’instruisit dans ses traductions des Nouvelles de Cervantes, et du livre de la Perfection chrétienne fait par Rodriguez [* 3] : de sorte qu’il pouvait passer pour un de nos bons traducteurs. Son dernier ouvrage, qui est les Amours d’Aristandre et de Cléonice, n’était pas des pires de son temps. »

(B) Un passage..... me fait croire que l’on tua notre d’Audiguier l’an 1630. ] Ce passage est pris d’une lettre de Balzac, datée du 20 d’août 1630 [* 4] D’Audiguier n’y est pas nommé, et l’on a mis des étoiles à la place de la personne que Balzac avait nommée ; mais je ne doute nullement que ce ne fût l’écrivain dont je donne ici l’article. Je crois que son caractère n’est pas mal représenté dans les paroles suivantes[3]. « Encore vaut-il mieux se réjouir innocemment à l’hôtel de Venise, que de se faire tuer aux Marais du Temple comme le pauvre ***, Je le plains certes en qualité de mort et de malheureux, et suis fâché qu’il n’ait eu loisir de songer au salut de son âme, et de demander pardon à Dieu. Mais de m’imaginer qu’une grande lumière de la France soit éteinte, et que nous ayons perdu un grand personnage, je le connaissais trop pour en avoir une si haute opinion. Il était véritablement homme de cœur, et avait certaines fougues d’esprit qui n’étaient pas mal plaisantes, pourvu qu’elles ne fussent pas imprimées. Mais il n’y avait point moyen de le souffrir parmi les auteurs modernes, et dans le recueil des vers de ce temps. Néanmoins il comptait pour rien son courage et toutes ses vertus militaires, et ne se piquait que de bien dire et de bien écrire. Il était d’ailleurs si persuadé de son mérite en ce genre-là, que pour l’avoir un jour voulu guérir de cette fâcheuse maladie, il ne m’a jamais bien aimé depuis, et il est mort, je m’assure, avec ce mal de cœur contre moi. »

  1. * Le Lysandre est de 1616, dit Leclerc, (M. Barbier, Examen et Critique des Dictionnaires, etc., dit. 1607), réimprimé en 1620 ; l’Aristandre de 1625 ; la Minerve de 1625.
  2. * Les Nouvelles de Cervantes ont été imprimées en 1613, dit Leclerc : M. Barbier dit 1618.
  3. * Imprimé en 1623, dit Leclerc.
  4. * Leclerc croit que d’Audiguier fut tué en 1626 ; Colletet, dans le passage rapporté en la note ci-dessus, a dit vers 1624.
  1. Notez que Sorel a critiqué les deux premiers, dans ses remarques sur le Berger extravagant, principalement dans le XIIIe. livre de ces remarques.
  2. Sorel, Bibl. franç., pag. 261.
  3. Balzac, Lettres, liv. VIII, lettre XLII, p. 387, 388, du tom. Ier. des Œuvres de Balzac, édition de Paris, chez Joly, en 1665, en deux volumes in-folio.

AVENTIN (Jean), célèbre par ses Annales de Bavière, a fleuri au XVIe. siècle (A). Il était de