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LES LORTIE

Il y eut un long silence pendant lequel Ninette lisait. Lorsqu’elle lui rendit la lettre il demanda :

— Eh bien, qu’en pensez-vous ?

— Ainsi, fit-elle, vous allez partir pour quinze jours.

— Exactement. New-York, Washington, Détroit…

— C’est un beau voyage.

— N’est-ce pas ?

— Du moins je le crois, dit Ninette, car, en somme je n’ai jamais été dans aucune de ces trois villes-là.

Il avait fait le tour de son pupitre et s’était approché d’elle.

— Vous souvenez-vous, dit-il, qu’un soir, au bord du fleuve, je vous ai demandé si vous aimiez les beaux voyages ?

— Oui, je m’en souviens.

— Là évidemment, il était question d’un long, d’un très long voyage…

— Dans un gros bateau…

— En Europe !

— Oui, soupira Ninette, en Europe.

— Bien sûr, reprit-il, New-York, Washington, Détroit, c’est moins loin, c’est peut-être moins beau, et… il n’y a pas de gros bateau. Pourtant, ma chère Ninette, si vous vouliez…

— Si je voulais quoi ? demanda-t-elle.

Il baissa la voix pour lui dire :

— Si vous vouliez, en attendant le gros bateau et le voyage en Europe, vous pourriez peut-être vous contenter du chemin de fer et du voyage aux États-Unis avec moi ?

— Mais, mais vous savez bien… balbutia Ninette, si surprise par l’audace de cette invitation, qu’elle ne trouvait rien à répondre