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LE CURÉ LABELLE

minés sur son immense territoire fut de songer à créer des lignes ferrées et appeler des colons.

On avait constaté à 500 lieues de Québec et sur les bords du Manitoba l’existence de « terres noires » d’une incroyable fécondité. Les missionnaires de ces pays faisaient de grands efforts pour y attirer les colons, et s’étaient adressés aux curés du Canada pour en obtenir. M. Labelle répondit à Mgr  Taché, archevêque de Saint-Boniface : « J’enverrai ceux de chez nous qui voudront y aller, parce qu’il faut fortifier l’élément français dans les contrées soumises à votre juridiction ; mais, combien j’aimerais mieux les voir se fixer dans les pays rapprochés de nous, afin d’avoir un centre de population catholique et française qui en peu de temps pourrait doubler notre province et devenir un rempart solide pour notre nationalité et notre foi ! »

Le désir exprimé dans ces lignes renfermait une vue profondément politique. Envoyer des colons dans les « terres noires » c’est fort bien, assurément ; mais ces colons seront toujours noyés dans l’élément anglais. Au contraire, fortifier la province-mère en opposant aux États-Unis envahisseurs une masse compacte et formidable de Français dans les pays du Nord, c’est rendre la conquête impossible, c’est assurer l’avenir de la patrie.

Ce plan de colonisation pouvait-il être réalisé et le nouvel apôtre aurait-il des preuves convaincantes à fournir à l’appui ?