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et ciselée est dans la dédicace au parfait magicien ès lettres françaises, notre grand et cher Théophile Gautier.

Pour ne m’en tenir qu’à ce qui concerne l’art, — le poëte restant le maître de son idée, comme a dit magistralement Victor Hugo, — je ne puis me taire sur les prodiges de poésie et de versification qui sont manifestés par votre œuvre.

Don Juan aux Enfers, les Spleen, Les Femmes damnées, Les Métamorphoses du Vampire[1], Les Litanies de Satan, Le Vin de l’assassin, Confession, etc., sont des poésies sans modèle et sans imitateurs pour longtemps. Votre verve, votre coloris, votre harmonie à part, ont pu seuls en venir à bout ; et que de secrets de forme comme de cœur s’en échappent ! Que de vers trempés d’une vigueur étonnante ou d’un enchantement inaccoutumé ! que de tours elliptiques et nouveaux, que de rhythmes dociles et fiers !

Enfin, je ne puis vous dire qu’une chose : soyez toujours ce que vous êtes si souvent ! — Voilà, en une ligne, ma critique et mon éloge sincères.

Ma gratitude ne l’est pas moins, ni mon sympathique dévouement.

Émile Deschamps.

    Et que par les esprits le Mal ressuscité
    Infectera les mœurs de la postérité ;
    Mais le vice n’a point pour mère la science,
    Et la vertu n’est pas fille de l’ignorance.

    Les Tragiques, liv. II.
    (Note de C. Baudelaire.)

  1. Cette pièce a été supprimée dans la deuxième édition et dans celle-ci.