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SALON DE 1846


I

À QUOI BON LA CRITIQUE ?

À quoi bon ? — Vaste et terrible point d’interrogation, qui saisit la critique au collet dès le premier pas qu’elle veut faire dans son premier chapitre.

L’artiste reproche tout d’abord à la critique de ne pouvoir rien enseigner au bourgeois, qui ne veut ni peindre ni rimer, — ni à l’art, puisque c’est de ses entrailles que la critique est sortie.

Et pourtant que d’artistes de ce temps-ci doivent à elle seule leur pauvre renommée ! C’est peut-être là le vrai reproche à lui faire.

Vous avez vu un Gavarni représentant un peintre courbé sur sa toile ; derrière lui un monsieur, grave, sec, roide et cravaté de blanc, tenant à la main son dernier feuilleton. « Si l’art est noble, la critique est sainte. » — « Qui dit cela ? » — « La critique ! » Si l’artiste joue si facilement le beau rôle, c’est que le