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d’autres morceaux également beaux. Ses ciels surtout m’avaient frappé à cause de leur transparence et de leur légèreté.

M. Catlin a supérieurement rendu le caractère fier et libre, et l’expression noble de ces braves gens ; la construction de leur tête est parfaitement bien comprise. Par leurs belles attitudes et l’aisance de leurs mouvements, ces sauvages font comprendre la sculpture antique. Quant à la couleur, elle a quelque chose de mystérieux qui me plaît plus que je ne saurais dire. Le rouge, la couleur du sang, la couleur de la vie, abondait tellement dans ce sombre musée, que c’était une ivresse ; quant aux paysages, — montagnes boisées, savanes immenses, rivières désertes, — ils étaient monotonement, éternellement verts ; le rouge, cette couleur si obscure, si épaisse, plus difficile à pénétrer que les yeux d’un serpent, — le vert, cette couleur calme et gaie et souriante de la nature, je les retrouve chantant leur antithèse mélodique jusque sur le visage de ces deux héros. — Ce qu’il y a de certain, c’est que tous leurs tatouages et coloriages étaient fait selon les gammes naturelles et harmoniques.

Je crois que ce qui a induit en erreur le public et les journalistes à l’endroit de M. Catlin, c’est qu’il ne fait pas de peinture crâne, à laquelle tous nos jeunes gens les ont si bien accoutumés, que c’est maintenant la peinture classique.

L’an passé, j’ai déjà protesté contre le De profundis unanime, contre la conspiration des ingrats, à propos