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ailleurs, et puis, il affecte tout haut de me dire, en faisant sonner l’r : « Et votre mère, elle est toujours avec la RRRépublique ?… ? »

LIANE.

Maurice !…

MAURICE, (gaiement.)

Eh bien, tout ça m’est égal… Je suis fier de toi… parfaitement. Si j’ai souffert, peut-être, parce que la vie t’avait faite jolie, j’en étais, aussi, très fier. Je suis heureux encore quand on parle de toi, même dans les journaux… Je suis joyeux de voir ton nom cité par Lorédan, dans les comptes rendus de première… Je suis heureux de tout, parce que c’est toi.

LIANE, (émue.)

Maurice, comme c’est gentil, ce que tu me dis là !

MAURICE.

Et ce qui me prive, ce qui me prive réellement, c’est de ne pas être un peu de ta vie. Tu comprends, j’ai eu une demi-enfance, moi… mon enfance s’est arrêtée net. Alors il y a un arriéré.

LIANE.

Mais, Maurice, mon enfant, as-tu vraiment été privé ? Écoute, tu me troubles, infiniment, tu m’ouvres des aperçus… qui me jettent tout à coup dans une perplexité infinie… Je me demande vraiment…

MAURICE, (s’exaltant.)

Si je n’avais pas été choyé du tout, je n’y penserais pas, tandis qu’encore maintenant, maintenant que je suis grand, presque un homme, je sens en moi comme une enfance ratée, un besoin de tendresse qui n’est pas de mon âge. Il me