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injuste… et peut-être infâme… Toi, ma fille, tu es la dernière à pouvoir mesurer le degré de ma sincérité… la sincérité qui a présidé à tous les actes de ma vie, même si les autres en ont jugé autrement. Je l’affirme ! Penses-tu que si je n’étais pas cet être absolument sincère, je ne vous jouerais pas, à toi et à ta belle famille, un petit tour que vous n’auriez pas volé… parfaitement… je ferais un simulacre de mariage… après quelques mois, un bon divorce et adieu mes enfants… J’en suis incapable ! Je ne suis pas sûre que toi, tu ne souscrirais pas à cet expédient si je te proposais de le mettre à exécution, mais moi, je me reprocherais d’avoir causé le malheur et le ridicule d’un homme que je ne veux pas pour mari, mais qui a toute mon estime et mon affection.

HENRIETTE.

Qui te propose de pareils trafics ?… Je réclame mon bonheur, seulement…

HONORINE.

Mais, sapristi, demande-le à l’homme que tu aimes et que tu as choisi… celui qui a la possibilité de te le donner.

HENRIETTE.

Pas plus lui que toi !… Mon bonheur est hélas aux mains des autres ! Je n’en dispose pas, c’est affreux. Il faut qu’on le négocie… Fernand subit comme moi la fatalité d’un état de choses préalable contre lequel il ne peut rien. Je ne discute pas si oui ou non la condition qu’on met à ce mariage est abusive… Mais je dis qu’un seul être, s’il le veut, peut faire mon bonheur… Oui, il ne dépend que de ma mère, et elle le refuse !

HONORINE.

Parfaitement ! Le devoir a ses limites. Je t’ai