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mots entrecoupés en ne lâchant pas son fils de ses bras.) Ah ! dans notre terrible et incertaine vie, l’enfant, tu le sais, tu me l’as dis tendrement, c’est l’horloge qui marque le temps, l’heure qui avance… c’est celui qui, aux yeux de l’homme qu’on aime et qui vous fuit, marque plus que tout le reste la mort de notre beauté. Mais voilà, tout à coup, quand la vie fait table rase de l’amour, en une seconde, alors l’enfant, c’est tout autre chose !… Je viens de le sentir… oui… oui… je le sens tout à coup à ton cri de reproche… Oui, c’est l’appui ! Je suis déjà ta vieille maman à laquelle tu vas prêter ton bras… Embrasse-moi bien ! Que veux-tu ? On se cherche dans le bonheur. On se trouve dans la souffrance.

MAURICE.

Ah ! que c’est bon d’entendre ces paroles-là, après l’horrible chose de tout à l’heure ! Tiens ! mets la main sur ma poitrine et sens ! Mais c’est fini ! Voilà, tout de suite, tu viens de trouver les mots qu’il fallait dire ! Ma petite maman !… Je t’aime, va, sans te le dire ! Tu as tant souffert que ça ?… Est-ce possible ?… Je ne pouvais pas deviner que c’était à ce point… Ah ! mais maintenant, fini. Tu vas voir… Oui, tu ne pouvais pas, bien sûr, te servir de moi, t’appuyer sur moi, mais maintenant, je te jure que tu seras heureuse, je te le jure, tu entends ! Traite-moi en homme et en ami, tu verras !… Mais le vilain geste que tu viens de faire, jure-moi, par exemple, que tu ne le feras plus, jure-le moi…

LIANE.

Je te jure d’essayer ! Je souffrirai s’il le faut la torture la plus effroyable, mais j’essaierai de la souffrir pour toi !…