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dans la fumée : c’est vrai !… Besnard éclaire ses personnages avec des lanternes : c’est vrai !… Puvis est un déformateur : c’est vrai !… Et qu’est-ce que cela peut faire, grands dieux !… Le jugement initial des contemporains s’arrête à ces impressions. Les auditeurs ou les spectateurs ne savent pas s’accuser eux-mêmes d’infériorité, ni surmonter l’irritation que leur procure ce premier contact indécis, franchir les frontières au-delà desquelles, avec un peu d’effort et de bonne volonté, ils trouveraient, tout de suite, ces satisfactions intellectuelles et ces plénitudes d’esprit qu’ils finissent par trouver quelques années plus tard, lorsque d’autres novateurs sont arrivés à leur tour et ont porté, plus loin encore, leurs jalons dans un champ où l’expérience est illimitée et où l’évolution s’accroît de façon incessante.

Mes pièces, sans être, je l’avoue, des phares de cette importance, et avec toutes leurs faiblesses ; mais parce qu’elles apportaient successivement quelques nouveautés de point de vue, parce que, la douleur ou la joie, les mouvements de l’âme, l’amour-passion, s’y exprimaient selon des modes inaccoutumés à la scène, et, peut-être surtout, parce que ma franchise jetait un jour plus concentré sur certains aspects intérieurs, mes pièces subirent ce sort commun. J’ai toujours eu horreur de me répéter, et j’ai par cela même déçu souvent des sympathies à l’heure juste où elles venaient de s’habituer à mes précédentes tentatives. Il m’eût été facile de faire le contraire. Le vrai succès, hélas ! n’est généralement obtenu par l’artiste qu’au moment même où il rabâche et ne vit plus que sur ses procédés. Progresser, chercher autre chose, c’est l’art certain de décevoir.

Mettons que mes pièces aient été, quand elles