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salle de théâtre ! Ceux qui se sentent atteints confusément dans leurs habitudes littéraires, dans leurs convictions politiques (cela domine terriblement toutes les autres questions) ou artistiques, voire même dans leurs habitudes confessionnelles. Beaucoup de ces gens ont une clientèle à satisfaire ! Il faut compter aussi les naïfs qui ne peuvent pas dépasser leurs doses coutumières, ceux qui n’ont jamais réfléchi sur eux-mêmes et se trouvent en face tout à coup d’un spectacle où la vie est exposée, selon une excellente expression, « en profondeur », les demi-intellectuels qui s’en tiennent à la lettre, les snobs qui sont des microbes prolifères et contagieux ; il y a des négateurs systématiques ; les admirateurs éternels du poncif en art ; d’autres qui, sur des œuvres assez diverses comme les miennes, ne savent pas bien sur quoi étayer leurs convictions ou leurs répulsions ; ceux qui croient sincèrement que parce qu’on traite des sujets vivants ou bourgeois, on déchoit de la poésie ; ceux pour qui le gros succès de public, la centième représentation, est un critérium infaillible d’infériorité. Il y a les partisans du réalisme intégral qui haïssent l’approche de tout lyrisme et aussi les arrière-gardes des anciennes écoles d’avant-garde… Que sais-je !… Les rédacteurs qui sont obligés d’obéir à leurs directeurs et aux amis de la maison ! Tous s’accordent sur un point : trouver en face d’eux le signe de l’immoralité. C’est là, pour l’opposition, un terrain d’entente toujours très facile parce qu’il est vague et que l’accusation portée a la force d’un argument d’intimidation.

Mais on trouve encore à cette résistance une raison supérieure : elle est d’ordre général, éternel, celle-là, et dépasse toutes les autres. C’est qu’une