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pas. C’est l’harmonie de toi à lui… Tiens, rien que la qualité de matière, au point de vue peinture, de ton linge, ni trop blanc, ni trop de couleur, sur ta chair mate… c’est, inouï !… Ce sont des trouvailles… Il faut le narcissisme, l’expérience que tu as de toi-même pour à ce point veiller à tout… L’amour, dans ces conditions, mais c’est un peu le ciel… parce qu’il y a l’harmonie totale ! Tous les sens sont ravis… Oh ! que j’ai hâte d’être à demain, chez toi… tu n’as pas idée !…

LA PRINCESSE.

Vous êtes un vrai collégien, mon ami !… Suis-je la première femme du monde qui se soit donnée à vous ?… Non, tais-toi, tu vas mentir, tu vas nommer quelqu’un de chic pour te vanter, et ce ne sera pas vrai… Vous avez du collégien naïf, mais ce n’est pas sans me séduire… Ainsi, l’autre matin, quand tu es venu, tu semblais affolé par ces draps brodés de soleils mauves. Et moi, je riais qu’un grand artiste, comme toi, soit assez hors de lui pour trouver ces horreurs géniales.

BERNIER.

Pourquoi horreurs ?

LA PRINCESSE.

Tais-toi ! Des monstruosités !… Un reste du temps où j’étais préraphaélite et où je faisais faire mon premier portrait par Burne-Jones, sur un trône de marbre ! C’était un vieux reliquat de mon affreuse jeunesse allemande. Seulement, je t’adore, quand tu es ainsi… avec ton œil et tes mains énervées… sensuelles. L’autre jour, dans le salon, pen-