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GEORGES.

Non ; ce n’est pas vrai.

JEANNINE.

Si ; autrefois je l’aimais, mais maintenant je la déteste ! du matin au soir la voir se rapprocher de vous, vous prendre la main, l’entendre vous tutoyer, vous faire des mines tout à son aise !… Chaque fois qu’elle est là, contre vous, et que je me dis : « Mon Dieu, comme elle a de la chance !… », chaque fois qu’elle vous appcoche de trop près, vous tient les mains… oh ! je la tuerais ! Et puis…

GEORGES.

Et puis quoi ? Laissez donc ce verre ! Vous allez le casser, dans le feu de vos démonstrations, et comme c’est mon verre de conférence…

JEANNINE.

Décidément, si je vous ai bien compris, vous me défendez de vous parler en particulier, parce que ça ne lui plaît pas, et parce que je vous gêne ?

GEORGES.

Ce n’est pas exact.

JEANNINE.

Ah ! oui, comme elle vous gêne la petite Jeannine ! comme vous préféreriez qu’il n’y ait jamais eu de petite Jeannine sur la terre ! Merci toujours de me le rappeler, au cas où je l’aurais oublié.

GEORGES tout d’un coup lève le poing sur la table.

Mais sapristi de sapristi !…

JEANNINE.

Quoi ?

GEORGES reste une seconde le bras en l’air, puis le laisse retomber mollement.

Rien.

(Un temps.)
JEANNINE, une moue.

Tenez, vous êtes tous les deux très gentils au fond,