Page:Bataille - Théâtre complet, Tome 12, 1922.djvu/121

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

pour elle, moi, Mademoiselle ! Vous la laisseriez passer cette jeunesse-là ? Ce joli moment de votre vie serait gâché par des caresses fanées qui m’ont toujours paru, à moi, le comble du cynisme ?… Mais voulez-vous bien déguerpir ensemble !… Comment, il y a deux gosses qui s’adorent et qui côtoyaient cette malpropreté ?… Eh bien ! j’ouvre la cage, au grand air… Allez donc, laissez-la craquer votre jeunesse, mes enfants !… Filez où bon vous semble, dans un garni, chez vous, ou ailleurs, mais aimez-vous, au moins ! Comme disait ma grand’mère : « Il n’y a pas de mal tant que ça fait joli sous le ciel bleu !… » Et, croyez-moi ne vous occupez pas d’un quinquagénaire blasonné qui se consolera facilement en se fourvoyant dans l’inconduite et l’honorabilité ! En voiture pour Cythère !… Vous vous étiez trompée, Mademoiselle, ce n’est pas ici qu’on prend les billets !

MAX, (suffoqué de joie.)

Ah ! le voilà, le vrai cri du cœur !… Tu vois, Jessie, tu vois ce que dit Monsieur !

SERGE, (éclatant de rire.)

Il est roulant, ce petit-là !

JESSIE.

Il n’y a plus maintenant dans ma vie la moindre place à l’imprévu, à l’hésitation… Puisque tous se liguent contre moi, contre ma volonté, et bien, j’ai le droit tout de même d’exiger qu’on me laisse seule… Je suis maîtresse de mes actes, à la fin ! (Elle s’éloigne et s’isole sur le canapé près du lit.) Vous abusez de la situation.

SERGE.

Prenez garde… un être entier dépend de son premier départ.