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NUNEZ.

Lui-même. Venez-vous me demander raison, vous qui guettiez sans doute à ma porte pour protéger la fuite du coupable ? Soit !… Complice ou non, vous êtes de sang noble. J’accepte. Dégainons !

(Il tire l’épée.)
DON JUAN.

L’épée au fourreau, duc ! Je ne viens pas vous demander raison. Je sais que votre honneur était en état de légitime défense. Je perds un camarade de jeunesse, mon désespoir est vif, mais je m’incline avec respect devant l’homme offensé qui a frappé et dont la loyauté n’est pas en cause.

NUNEZ.

Merci, monsieur, de ce témoignage. Alors, que venez-vous faire ?

DON JUAN.

Je viens réclamer le corps de mon ami !

NUNEZ.

Il m’est impossible de me rendre à ce vœu. Voulez-vous consulter le capitaine ? Je ne dois de compte à personne, ayant droit de haute et basse justice sur mon fief.

DON JUAN.

Je frémis ! Et la sépulture chrétienne ?

NUNEZ.

Il l’aura ; son corps ne sera pas jeté aux chiens ; il sera mis en bière, et enterré très chrétiennement. Connaissez-vous un parent de Don Juan de Manara auquel vous désirez que la dépouille soit remise ?