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Le petit Freddy, qui tenait de sa mère son vif amour de la campagne, dit à son cousin Pierre, en lui montrant le jardin et la double rangée d’érables bordant la cour, à travers lesquels on apercevait les bâtiments blanchis à la chaux :

— Comme c’est grand, et beau, chez vous, et comme tu dois être heureux de respirer à ton aise, de courir dans l’herbe, de te rouler, de t’étendre sans craindre les taloches et les mots crus des grands garçons ! Chez nous, on n’a qu’une petite cour toute en terre, avec un hangar de rien. Quand il pleut, l’eau y reste des jours et des jours. Tu sais, en ville, le soleil n’est pas comme par ici, ni aussi chaud ; il prends du temps à sécher nos petites cours.

Au-dessus de chez nous, il y a des gamins, et comme ils ont droit à la cour, ils sont toujours dedans ; et je ne puis jouer à rien, ni rien dire parce qu’ils sont sournois comme tout. Il y a une manufacture sur la rue d’en arrière, ça fait tant de fumée qu’on étouffe parfois, et que maman doit fermer les fenêtres de ce côté-là malgré la grosse chaleur qu’il fait.

— C’est-y de la fumée comme les gros chars ? dit petit Pierre. En fait de fumée qui nous enveloppe, il ne connaissait