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et des aventures ; rien d’inutile ; tout se tient, tout s’enlace, tout marche droit au but. Toujours à l’écart, l’auteur n’intervient qu’en de très-rares occasions, soit dans le courant de la pièce, lorsque le sens l’exige impérieusement, soit à la fin, lorsque le drame en suspens hésite, au moment d’atteindre le but.

Son allure brusque et sans transitions, est parfaitement naturelle ; il raconte un événement que tout le monde a présent à l’esprit ; il est donc inutile qu’il entre dans de longs détails, il suffit qu’il saisisse les traits saillants, et qu’il les mette dans un jour tel qu’ils puissent frapper la vue et se graver dans l’âme du spectateur. Quelquefois la nature l’inspira, à rendre l’art jaloux ; mais le plus souvent, enfermé sans guide dans le dédale de la routine, il est impuissant à se faire à lui-même des ailes pour s’envoler.

Homère, lui seul, en sortit. Des régions banales de la poésie vulgaire, il sut s’élever jusqu’aux sommets les plus sublimes de l’art ; mais encore est-il juste de remarquer qu’il est fort souvent monotone, comme tous les poëtes populaires. Ainsi, que ses acteurs aient à parler ou à agir, il les met constamment en scène de la même manière. Il emploie mille fois la même forme, il répète mille fois le même vers entier. Ses hérauts rapportent littéralement les messages des chefs. Ses épithètes sont presque toutes tirées de la nature physique, et se reproduisent uniformément. Minerve a des yeux bleus, Junon des yeux de génisse, les Grecs de belles cnémides ; la mer est toujours verte, le ciel toujours profond, la terre toujours vaste.

Tous les poëtes populaires offrent les mêmes formes, la même allure, les mêmes tournures parasites, les mêmes répétitions, les mêmes épithètes naturelles, pour ainsi