Page:Barzaz Breiz 4e edition 1846 vol 1.djvu/70

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de Vannes, qui mentionnent au cinquième siècle les cérémonies et les chansons d’amour des noces[1], sont des titres apocryphes ; que la lèpre désolait encore la Bretagne postérieurement à l’année 1500 ; ou bien que tous les auteurs des chants mentionnés sont des imposteurs du temps de la reine Anne, qui, par la force du génie, ont deviné l’histoire des siècles passés[2].

Mais, en supposant, nous dit-on, que les événements dont on vient de parler aient pu donner naissance à des chants quelconques, il est impossible que ces chants nous soient parvenus sans avoir éprouvé une transformation complète.

À cela nous n’avons qu’une réponse à faire : c’est que les allusions des chanteurs populaires, soit aux événements, soit aux personnages de leur temps, c’est que les aventures qu’ils attribuent à leurs héros sont vraies, ou du moins vraisemblables ; c’est que les mœurs, les idées, les costumes qu’ils leur prêtent, sont naturels et conviennent à merveille à l’époque où se passent les faits mentionnés. Nous parlerons du style plus tard.

Ainsi, dans les chants héroïques ou historiques, quand l’auteur de la ballade de Merlin nous le représente, tantôt comme Un devin puissant, tantôt comme un barde malheureux qui fuit la compagnie des hommes, quoi de plus naturel ? Un des deux Merlin n’était-il pas surnommé chef des enchanteurs[3] ? l’autre n’a-t-il pas écrit tout un poëme

  1. Nuptiarum convivia… ubi amatoria cantantur, et motus corporum choris et saltibus efferuntur. (Loco supra citato.)
  2. L’opinion que nous combattons ici fut d’abord celle de M. Raynouard. Mieux informé, il reconnut son erreur et prouva qu’il en était complètement revenu en prenant part, sur son lit de mort, à la publication d’un des plus anciens monuments de la poésie bretonne : le Mystère de sainte Nonne.
  3. Myvyrian, t. I, p. 79.