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INTRODUCTION.

seule la chaumière, vieillards et jeunes gens, filles et garçons, chantent et content tour à tour. Quelquefois un poëte ambulant, qui va chantant de ferme en ferme, comme allaient ses aïeux de manoir en manoir, vient frapper à la porte au milieu de la nuit, et paye en chansons à ses hôtes l’hospitalité qu’on lui donne.

Mais aux foires, aux fêtes du lin et aux fileries on ne chante guère que des ballades ; aux fêtes des noces et de l’agriculture, que des chansons d’amour, que des cantiques aux veillées funèbres; aux assemblées religieuses connues sous le nom de Pardons, qu’ils portaient déjà du temps où vivait Dante, on chante et des chants historiques, et des chants d’amour, et des cantiques et des légendes.

Les grandes réunions nationales chez tous les peuples anciens doivent leur origine à la religion. Les Gaulois s’assemblaient sous les ordres de leurs druides, dans un lieu consacré[1]. Les vieilles lois Moelmutiennes, qui font mention de réunions semblables dans l’ile de Bretagne, antérieurement au dixième siècle, les appellent des « synodes privilégiés de fraternité et d’union,» et les disent présidées par les bardes[2]. Le christianisme leur fit perdre leur caractère païen, mais il ne parait avoir changé ni leur institution fondamentale, ni leurs cérémonies, ni leurs usages, ni le temps, ni le lieu des réunions ; fidèle à sa prudente manière d’agir avec les barbares, il n’abattit pas le temple, il le purifia : le menhir est toujours debout, mais la croix le domine.

C’était aux solstices qu’avaient lieu en Cambrie, comme les assemblées druidiques, les plus grandes réunions chrétiennes; c’était dans les lieux consacrés par la religion des ancêtres, au sommet des tumulus, parmi les dolmen, au bord des

  1. Considunt in loco consecrato. (Cæsar, de Bello gallico, lib. VI.)
  2. Myvyrian, t. III, p. 290.