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INTRODUCTION

« Lundi, mardi, mercredi, » auquel ils ont ajouté par la suite : « jeudi et vendredi » ; mais ils se sont bien gardés d’aller jusqu’au samedi et surtout jusqu’au dimanche, jours néfastes pour eux comme pour les fées. Malheur au voyageur attardé qui passe ! il est entraîné dans le cercle et doit danser parfois jus- qu’à ce que mort s’ensuive. Le mercredi est leur jour férié; le premier mercredi de mai, leur fête annuelle; ils la célèbrent avec de grandes réjouissances, par des chants, des danses et de la musique.

Les Bretons, comme les Gallois, les Irlandais et les montagnards de l'Écosse, les supposent faux monnayeurs et très-habiles forgerons. C’est au fond de leurs grottes de pierre qu’ils cachent leurs invisibles ateliers. Ce sont eux qui ont écrit ces caractères cabalistiques qu’on trouve gravés sur les parois de plusieurs monuments celtiques du Morbihan et particulièrement à Gawr-iniz, ou l’ile du Géant: qui viendrait à bout de déchiffrer leur grimoire connaîtrait tous les lieux du pays où il y a des trésors cachés. Taliésin se vantait d’en avoir le secret[1]. Les nains sont sorciers, devins, prophètes, magiciens. Ils peuvent dire comme leur frère Alvis, de l’Edda: « J’ai été partout et je sais tout.» Les jeunes filles en ont grand’peur, et goûtent peu, quoiqu’elles ne soient plus aussi dangereuses qu’au siècle de Merlin, leurs privautés lutines. Le paysan, en général, les redoute pourtant moins que les fées : il les brave volontiers et s’en rit s’il fait jour, ou s’il a pris la précaution de s’asperger d’eau bénite; il leur attribue la même haine qu’aux fées pour la religion ; mais cette haine prend une tournure plutôt malicieuse et comique que méchante. On dit, à ce sujet, qu’on les a surpris, au brun de nuit, commettant en rond et en se tenant par la main, avec mille éclats de rire diaboliques, certains actes moitié sérieux, moitié bouffons, mais toujours fort impies et cyniques... au pied des croix des carrefours.

  1. Myvyrian, t. I, p. 34.