Page:Barre - Le Symbolisme, 1911.djvu/20

Cette page a été validée par deux contributeurs.
4
LE SYMBOLISME

renouveau des tendances spiritualistes qu’elle rayonne même au delà du détroit. La traduction française du livre de Mallock : la Vie vaut-elle la peine de vivre ? paraît en 1882. Elle a de suite un énorme retentissement. Du coup, la religion et l’art regagnent le terrain perdu par le positivisme. L’un et l’autre représentent la forme la plus tangible et peut-être la plus compréhensive du spiritualisme. Des penseurs reconnaissent leur utilité, sinon leur nécessité. Paul Janet proclame que la morale naturelle n’est pas inséparable de la morale religieuse. Ravaisson fait de cette morale une succursale de l’esthétique et ce besoin d’idéalisme a pour terme le demi-panthéisme de M. Lachelier ou le Nouveau spiritualisme de M. Vacherot. Ce dernier ouvrage fait toucher du doigt l’opposition des tendances qui divisent alors les esprits. D’un côté, négation de l’idéal, de l’autre, culte obstiné de cet idéal. On ne méconnaît pas, dans les sphères intellectuelles, que le positivisme ait rendu d’appréciables services, mais on sent le besoin d’une philosophie où l’idéal, le parfait et le vrai soient les aspects de la réalité divine.

Cette renaissance du spiritualisme traduit dans ses tentatives absolues ou conciliatrices les préoccupations antimatérialistes de l’élite. Pour la foule, son idéalisme l’incline à d’autres préférences. L’année 1884 voit paraître la trente-troisième édition du Spiritisme à sa plus simple expression, la trente et unième édition du Livre des Esprits, les deux ouvrages les plus populaires d’Allan Kardec. Les conférences spirites se multiplient et trouvent des auditeurs attentifs et fidèles. De 1882 à 1884, M. F. Vallès en peut publier avec un certain succès tout un recueil. Dans d’autres cercles où les doctrines spirites paraissent incompatibles, soit avec l’éducation scientifique, soit avec le respect de la tradition, on s’essaie à rénover les religions de l’Inde, et Paris au moins assiste à une renaissance du néo-bouddhisme que Barthélemy Saint-Hilaire n’hésite pas à qualifier d’épi-