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LES DÉRACINÉS

de Girard pour les animaux et poussé à ce point qu’il achetait des chevaux malades à vil prix pour les soigner, ce qui lui permit dans une fortune assez modeste d’avoir un cheval de trait et un de selle, ce dernier lui gagnant des paris.

Girard se chargea d’aller trouver le prince Napoléon et de maintenir des relations utiles que Portalis ne pouvait avouer. Celui-ci n’abandonnait pas l’idée de son triumvirat républicain ; il voulait aller vite et à l’américaine, c’est-à-dire acheter des concours comme a fait depuis le Boulangisme. Son premier, soin devait être de rallier ses collaborateurs. À prix d’argent, il y parvint. Alceste fit sa rentrée avec un article : « À bas Chambord ! » qui fit supprimer le Corsaire. Portalis réorganisa un nouveau journal : la Ville de Paris, qui tout de suite eut le même sort. Sur ces entrefaites, le comte de Chambord se retira. Les monarchies étaient en déroute. C’était la République. Mais Portalis, tout de même était par terre, accablé, excommunié, et l’état de siège durait. Le prince se lassa. Portalis à la fin de 1873 disparut.

Portalis vaniteux, égoïste, comme tous les fils de famille avait de l’allure, mais pas de résistance. Son père lui offrit de 12 à 15,000 francs par an à condition qu’il ne ferait plus rien.

Après six années il réapparut. Sa situation était difficile. C’était le centre droit, Broglie et les ducs, qui tenaient le pouvoir tandis que Gambetta était reconnu comme le chef de l’opposition. Son équipée napoléonienne lui fermait la politique à moins qu’il ne redevînt une force.

Un Gambetta est en mesure de maintenir son journal dans les discussions d’idées, sans y mêler