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SOUS L’ŒIL DES BARBARES

rognure de système à baratter. Vraiment, je me soucie peu de connaître ces angoisses.

Ce que j’aime et qui m’enthousiasme, c’est de créer. En cet instant je suis une fonction. Ô bonheur ! ivresse ! je crée. Quoi ? Peu importe ; tout. L’univers me pénètre et se développe et s’harmonise en moi. Pourquoi m’inquiéter que ces pensées soient vraies, justes, grandes ? Leurs épithètes varient selon les êtres qui les considèrent ; et moi, je suis tous les êtres. Je frissonne de joie, et, comme la mère qui palpite d’un monde, j’ignore ce qui naît en moi.

Lourds soirs d’été, quand sorti de la ville odieuse, pleine de buée, de sueur et de gesticulations, j’allais seul dans la campagne et, couché sur l’herbe jusqu’au train