Page:Barrès - La Colline inspirée, 1913.djvu/431

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Et puis soudain, ce grand sentiment, cette immortelle espérance, voilà qu’ils sont engloutis dans la mort. Les taillis du jardin se taisent, une sensation indéfinissable d’angoisse nous remplit. Toute la magie s’est dissipée. Regarde là-haut les étoiles avec qui nous sommes accordés : l’infini les sépare de notre destin ! À quoi bon nos grandes ailes de désir ?

Nous sommes-nous égarés ? L’esprit de la colline serait-il un esprit de perdition ? Faut-il demander à la raison d’exorciser cette lande ? Faut-il laisser en jachère les parties de notre âme qu’elle est capable d’exciter ? Faut-il se détourner de Léopold, quand il se laisse soulever par le souffle de Sion ?

Non pas ! C’est un juste mouvement de la part la plus mystérieuse de notre âme qui nous entraînait avec sympathie derrière Léopold sur les sommets sacrés. Nous sentons justement quelque similitude entre ces hauts domaines et les parties les plus desséchées de notre âme. Dans notre âme, comme sur la terre, il existe des points nobles que le siècle laisse en léthargie. Ayons le courage de marcher à nouveau, hardiment, sur cette terre primitive et de cultiver, par-dessous les froides apparences, le royaume