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avec un pommeau de sabre. Le chef de famille dit aux femmes de s’enfermer dans une même chambre, et lui il descend. C’est l’envahissement de toute la maison, le vacarme le plus brutal, puis le silence des soldats exténués…

Ces nouveaux venus sont plus redoutables que les premiers. Quelques semaines de campagnes les ont ensauvagés. Au quitter de Strasbourg en flamme, dans la traversée des Vosges, ils ont subi les attaques nombreuses des francs-tireurs et des mobiles, qu’ils appellent des paysans armés. Ils n’en cachent pas leur peur maladive. Ce sont des demi-brutes déchaînées, qui ont fait l’apprentissage du sang et de l’incendie. Que les autorités municipales prennent garde ! Elles restent seules, puisque tous les fonctionnaires et jusqu’aux gendarmes sont partis. Ah ! c’est fini, l’agrément d’être monsieur le Maire, et le bien-être d’avoir de la fortune, de la considération ! Maintenant les notables sont tenus pour otages. Si l’on touche au moindre cheveu d’un soldat prussien et s’il plaît à quelque patriote de devenir un héros, c’est M. le notaire, c’est M. le docteur, c’est M. le gros propriétaire qui seront collés au mur.

Nul homme n’est aussi peu étonné que