Page:Barrès - La Colline inspirée, 1913.djvu/317

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— Oh ! répondit le vieillard, je vous vois venir… (Il disait cela sans amertume et même d’un air souriant.) On vous a endoctriné contre nous. Nous sommes des damnés.

— Parfaitement, Monsieur Baillard.

De sa belle voix, noble et tranquille, Léopold commença de se justifier. Mais le jeune abbé visiblement suivait une consigne :

— Monsieur, il y a assez de temps que vous venez ici pour détourner mes parents de la vraie foi…

— Je comprends ce que vous voulez, dit alors Léopold.

Et sans rien ajouter, il quitta la maison. Au bas de la côte Mme Haye le vit revenir avec surprise.

— Comment, Monsieur le Supérieur, vous ne demeurez pas comme d’habitude pour le souper ? — Bonne mère, on m’a chassé.

— Chassé ! Et qui donc ?

— Votre petit-fils.

La vieille femme fut indignée.

— Comment ! Chasser Monsieur le Supérieur ! Un saint ! Un homme à la cheville duquel ce gamin n’ira jamais ! Il ne sait donc pas qu’on venait pour vous entendre de sept lieues à la ronde !