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Une année encore, une année où il ne voit rien, ne reçoit rien de l’extérieur, où il ne fait que se durcir et se ramasser dans sa pensée comme dans une plus étroite caverne. Mais au sortir de cette prison d’Angers, en 1857, après une année de détention et quatre d’exil, cinq ans après la nuit de tragédie qu’il a passée dans les ruines de la vieille tour, il ne fait qu’une envolée jusqu’à Saxon. Ses deux frères l’y attendent avec Marie-Anne Sellier, avec les sœurs Euphrasie et Quirin, avec quelques fidèles, tout un petit peuple, plein de modestie, de bonne volonté et d’émotion. Le pauvre François, bien changé, bien affaibli, mais tout heureux, le serre dans ses bras. Ce beau jour est son œuvre. Une fois encore, Ariel a ranimé les flammes éteintes dans l’île de Prospéro. Charmant François ! Il a fait l’office du bon chien de berger, au cœur fidèle, resté seul sur le domaine abandonné et qui saisit avec un bond joyeux le moment de rassembler ses moutons dispersés.

La colline de Sion Vaudémont a réellement fasciné les Baillard. Léopold l’a aimée d’un amour qui venait quasi des arrière-fonds de sa nature animale. Quel pouvoir exerçait-elle sur cette âme primitive ? On songe à ce lac