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relayèrent pour l’insulter et monter la garde autour de lui. Euphrasie et Lazarine, qui voulurent s’approcher pour le consoler et lui donner quelque nourriture, furent impitoyablement écartées, jusqu’à une heure de l’après-midi, où sœur Euphrasie réussit à lui remettre un peu de sucre et à lui glisser un billet de son aîné qui lui disait : « Courage, martyr du ciel. J’ai prévenu la gendarmerie. »

Vers cinq heures, le prisonnier, en regardant par la fenêtre, vit venir deux gendarmes à cheval. Il ne douta pas que l’instant de sa revanche ne fût arrivé, et, écartant ses gardiens, il s’installa dans la chaire du maître d’école pour exposer ses plaintes aux représentants de la force armée avec plus d’autorité. Mais le brigadier, comme en fureur lui-même, le fit taire aussitôt :

— Scélérat, vous avez donné un coup de pied au maire.

— Moi ! moi ! j’ai donné un coup de pied à monsieur le maire ! s’écria le grand François suffoqué d’indignation. Mais avec ma force et ma taille et la prise que me donnait sa corpulence, je l’aurais éventré ! Le fait d’ailleurs est contraire à mon caractère sacerdotal et mon caractère personnel, connu de tous pour être trop bon et miséricordieux.