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L’Oblat fit honte aux vaincus. Il leur reprocha de s’être arrêtés aux subtilités juridiques d’un imposteur, et il annonça partout que l’opération allait être reprise sans délai. Mais une affreuse tourmente de neige survint qui rendit les chemins impraticables durant plusieurs semaines. Les Baillard virent là un signe de la protection céleste.

À la nouvelle lune toutefois, le temps passa au sec. Par une belle matinée de gel, des charrettes amenèrent de nouveau des pierres devant le porche, et des maçons, traversant la nef et la sacristie, les portèrent à l’entrée du fameux corridor.

Cette fois, les sœurs s’étaient abstenues de pénétrer dans l’église ; elles se tenaient sur leur propriété, debout dans le couloir. Mais à peine les ouvriers avaient-ils posé un moellon, qu’une sœur le saisissait, le soulevait et l’envoyait rouler par delà l’étroite sacristie jusque dans le sanctuaire. Le Pontife de Sagesse, François, entendant tout ce vacarme, n’y peut tenir. Il survient comme un tourbillon. Sa vue centuple le courage des cinq nonnes ; les maçons reculent. Le Conseil municipal, maire, adjoint en tête, apparaît. Ramenés au combat, les ouvriers commencent de construire leur mur sous les injures et les coups.