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« PARAÎTRE OU DISPARAÎTRE, MON GÉNÉRAL ! »

ditions de la société moderne et de dissiper les préjugés de celle-ci envers notre passé ; au milieu de toutes ces oscillations continue à se poser, mais de plus en plus épuré, le problème boulangiste : « Où la France trouvera-t-elle les énergies nécessaires pour qu’elle demeure une nation et un facteur important dans le monde ? »

En avril 1890, le Comité politique qui discute à la Pomme d’Or ses candidats municipaux semble ignorer ce danger national, ou du moins il se désintéresse de comprendre son étendue et sa gravité, dont les masses pourtant eurent l’instinct quand elles créèrent Boulanger. Ces praticiens donnent l’impression que le parti s’est rapidement vidé de tout principe, pour ne devenir rien que des soldats autour d’un chef.

Le caractère personnaliste du boulangisme ne fut jamais plus exalté, que dans ses contractions suprêmes. La vieille garde forma le carré et supporta héroïquement l’assaut des vaincus du 27 janvier, grossis cette fois par la défection des monarchistes. Après un corps à corps acharné, après que se furent multipliés jusqu’à l’épuisement les entraîneurs du parti, apparaissant le même soir dans une suite de réunions, au milieu des clameurs enthousiastes des cent quarante mille fidèles qu’on gardait tout de même, et après qu’on eut dépensé une somme mystérieuse de 170.000 francs, on aboutit au premier tour (27 avril 1890) à l’élection du seul Grébauval.

Dans cette catastrophe, comme on court au drapeau, les partisans décimés se resserrent autour de Boulanger ; ils n’attendent rien que de lui, ou bien, à la française, ils crieront : « Trahison ! » Le di-