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BOUTEILLER ET LE PARLEMENT

tié. Les ducs Pasquier et de Broglie, MM. Cochin, Ferdinand Duval, Calla, Lambert de Sainte-Croix, Keller, croyaient volontiers avec M. Jules Ferry que la dignité humaine est intéressée au bavardage de la tribune où ils avaient trouvé beaucoup d’agrément, Les purs légitimistes reportaient sur le boulangisme leurs vieilles rancunes contre l’Empire.

Au Sénat et dans un milieu que toutes les nouveautés offensent par elles-mêmes, M. Challemel-Lacour, plus vivement encore, poussait la pointe aux conservateurs.

— Eh quoi ! disait-il, après avoir rompu tragiquement, il y a un siècle, avec une maison d’une grandeur sans égale dans l’histoire, la France tomberait sous les pieds du pire aventurier ! Vous acceptez cela, dites-vous, parce que le parlementarisme ne convient pas au tempérament de votre pays ! Les fautes que vous dénombrez ne naissent pas du système, mais d’un parti qui en a méconnu les conditions et faussé les ressorts. On peut dire que, depuis dix ans, le gouvernement parlementaire n’a jamais été sincèrement pratiqué. Un ministère homogène et solidaire, avec une politique déterminée dont il est résolu à ne pas se départir, et en face une majorité reconnaissant dans le cabinet sa propre pensée, lui laissant le pouvoir comme la responsabilité et décidée à le soutenir sans fantaisie, sans défaillance : voilà ce que doit être le parlementarisme. Qu’a-t-il été chez nous ? Les membres les plus qualifiés du parti radical out posé en principe que dans le gouvernement il ne fallait pas voir un guide, mais un serviteur ; au lieu de se prêter courageusement aux